Dans son arrêt du 13 avril 2021, la plus haute juridiction administrative a partiellement annulé le décret GendNotes qui autorise notamment la gendarmerie à collecter des données relatives à l’orientation sexuelle. Ces informations ne pourront plus être transmises pour être exploitées ensuite dans d’autres fichiers.
La nouvelle application de collecte de données conçue pour remplacer le carnet de notes des gendarmes, GendNotes, autorisée par le décret du 20 février 2020, permet de saisir une quantité importante de données personnelles, relatives entre autres à l’orientation et à la vie sexuelle. Des informations sensibles qui ne pouvaient être collectées qu’en « cas de nécessité absolue », mais laissé à la libre appréciation des gendarmes.
Contestant ce décret, STOP homophobie, Mousse, Familles-LGBT et Adheos ont formé un recours devant le Conseil d’État en juin 2020. D’autres associations, comme La ligue des droits de l’Homme, ont également saisi la haute juridiction, contestant la légalité de GendNotes.
Mais en dépit des sollicitations, le Conseil d’État n’a procédé qu’à l’annulation partielle du décret, avec la suppression de l’article prévoyant que les données collectées puissent être exploitées « dans d’autres traitements, notamment par le biais d’un système de prérenseignement ».
L’article contesté ne précisait pas en effet l’identité ni la nature des autres fichiers vers lesquels étaient susceptibles d’être transférées les données recueillies lors de l’utilisation de l’application, ne satisfaisant pas à l’exigence de finalité « déterminée, explicite et légitime » imposée par la réglementation. Concrètement, GendNotes ne pourra pas être interconnecté à d’autres fichiers afin de leur transmettre automatiquement les données personnelles consignées. Cette restriction apporte une garantie importante, afin d’éviter que des données relatives à l’orientation sexuelle ne soient disséminées dans plusieurs fichiers sans que les personnes concernées n’en soient averties.
En revanche le Conseil d’État a considéré que la collecte des données relatives à l’orientation sexuelle n’interviendrait qu’en cas de nécessité absolue, et qu’il n’y avait ainsi pas lieu de l’interdire. Il a cependant précisé qu’il ne sera pas possible de procéder à la recherche d’une personne à partir de données concernant son orientation sexuelle. Il s’agit d’une restriction qui devra être intégrée à l’application GendNotes.
Une décision insuffisante
C’est une victoire en demi-teinte, car si la décision restreint l’utilisation qui pourra être faite de l’application, elle ne suffit pas à faire obstacle aux risques de discrimination et d’atteinte à la vie privée représentée par celle-ci. Cette décision est donc insuffisante dans la mesure où les forces de l’ordre, sans plus de contrôle, pourront collecter et conserver des données relatives à l’orientation sexuelle et à la vie sexuelle.
Pour Me Etienne Deshoulières, avocat des associations, « il est incompréhensible que la gendarmerie puisse collecter des données relatives à l’orientation sexuelle, en dehors de cas très spécifiques comme la commission d’une infraction à caractère sexuel. Nous étudions la possibilité de porter plainte devant la Commission européenne pour non-respect du Règlement général sur la protection des données par la France. »