Ce 11 décembre, sur 40% des électeurs kirghizes, près de 80% ont approuvé par référendum une série de réformes, dont un amendement particulièrement critiqué par le Conseil de l’Europe, qui définit désormais le mariage comme un contrat « entre un homme et une femme », plutôt qu’« entre deux personnes », conclue librement et de plein gré comme précédemment.
Le Kirghizistan, ancienne république soviétique d’Asie centrale à majorité musulmane de six millions d’habitants, a vécu deux révolutions en 25 ans d’indépendance, avec la chute du chef de l’Etat en place en 2005 puis 2010, ainsi que de nombreux épisodes de violences ethniques.
« 28 gouvernements, et l’instabilité n’a pas cessé après la proclamation d’une Constitution démocratique. » Interviewé par « l’Obs », le président Almazbek Atambaïev, proche allié de la Russie, affirme que le but premier de ces textes est donc « de renforcer la stabilité du gouvernement en transférant des pouvoirs du président au Premier ministre et en limitant la capacité du Parlement à voter des motions de censure. »
Ces amendements devraient en outre empêcher une éventuelle dérive autoritaire : « Je suis bien placé pour le savoir », insiste-t-il. « Il faut mettre en place des mécanismes de défense contre ces velléités… »
Appels du pied à l’électorat conservateur, l’opposition redoute par ailleurs une manœuvre pour permettre au Chef de l’état de rester au pouvoir après la fin de son mandat : M. Atambaïev n’ayant pas le droit de se représenter à l’élection présidentielle en 2017, il pourrait en effet devenir Premier ministre, même s’il assure ne pas en avoir l’intention.
Une démarche alarmante, dans ce pays où, comme le déplore également Amnesty International, « la torture, les mauvais traitements, et l’impunité pour ces violations des droits demeurent des lieux communs ».
En janvier 2014, Human Rights Watch publiait, pour la première fois, un rapport (intitulé « Ils nous ont dit qu’on le méritait ») attestant de la situation des LGBT, considérés au Kirghizstan comme des « criminels ambigus », mais aucune recommandation n’a été suivie. Au contraire, le Parlement kirghize débat depuis 2014 d’une disposition contre toute activité incitant ou provoquant une « attitude positive envers les relations sexuelles non-traditionnelles ». Une loi plus sévère encore que celle adoptée en Russie en juin 2013.
La Constitution n’étant pas modifiable selon la loi avant 2020, des députés soutiennent cependant avoir subi des pressions pour autoriser la tenue de ce scrutin du 11 décembre, et un tiers de ceux qui ont voté contre le référendum sont aujourd’hui sous le coup de la justice. En septembre, le président avait déjà demandé au Procureur général d’entamer des poursuites judiciaires contre d’anciens membres du gouvernement, après qu’ils eurent affirmé leur opposition aux amendements.
Anne V. Besnard
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