L’école et le mariage gay : le deux poids et deux mesures de Vincent Peillon

En mettant en garde l’enseignement catholique contre d’éventuels débats sur le mariage, Vincent Peillon a-t-il voulu rallumer la guerre scolaire, comme l’en accuse la droite ?
Ce qui est sûr, c’est qu’à une semaine de la manifestation à Paris des opposants au mariage gay, l’intervention du ministre de l’Education nationale durcit le débat plus qu’il ne l’apaise.
Revenons à la lettre initiale du secrétaire général de l’enseignement catholique. Eric de Labarre suggérait aux directeurs d’établissement de prendre des initiatives pour, je le cite, « permettre à chacun l’exercice d’une liberté éclairée ». Vincent Peillon, on le sait, est un philosophe, de surcroît spécialiste des Lumières. S’il avait eu une réelle volonté de dialogue, il aurait pu le prendre au mot et souhaiter que partout, pas uniquement à l’école catholique, les libertés soient « éclairées » par la présentation et la confrontation des points de vue.
Or, il y a deux points frappants dans la lettre du ministre de l’Education aux recteurs. D’abord, dans l’initiative du secrétaire général de l’enseignement catholique, il ne voit que des risques d’ « incidents » voire d’incitation à l’homophobie. Comme si la contestation voire un simple questionnement du projet du gouvernement était assimilé à de l’homophobie. Or, c’est Lionel Jospin, et pas Christine Boutin, qui rappelait récemment : « on peut être contre le mariage homosexuel sans être homophobe ».
L’autre point troublant dans la lettre de Peillon aux recteurs, c’est qu’en même temps qu’il exige une absolue neutralité de l’enseignement catholique, il demande que soient davantage invitées dans tous les établissements des associations qui, sous couvert de lutte, légitime, contre l’homophobie, sont d’ardentes militantes du mariage et de l’adoption homosexuels ainsi que de la théorie du genre. Autrement dit des associations qui ne prétendent en rien à la neutralité.
Il y a donc dans l’attitude de Vincent Peillon un côté deux poids et deux mesures d’autant qu’on a vu récemment Najat Vallaud-Belkacem, là encore sous couvert de son rôle ministériel de lutte contre l’homophobie, expliquer à des élèves que le mariage gay était une « avancée » qui apporterait « plus d’épanouissement et plus de liberté ».

Hier, l’ancien ministre Laurent Wauquiez a annoncé le dépôt d’une motion référendaire. Un référendum est-il possible sur le mariage homosexuel ?
Les Français le souhaitent. A 69 %. Le paradoxe est que le gouvernement qui prétend donner aux Français un « droit nouveau » exclut cette hypothèse. C’est un classique : le référendum est toujours brandi dans les campagnes électorales mais un président n’y recourt que quand il est sûr de le gagner. Même s’il n’est pas à l’abri d’une mauvaise anticipation, comme Jacques Chirac sur l’Europe en 2005. Deux révisions constitutionnelles ont même élargi le champ d’application référendaire. Donc sur le plan institutionnel, un référendum sur le mariage homosexuel est tout à fait possible. Mais dans un contexte global d’impopularité et sur un sujet aussi piégé, on voit mal François Hollande prendre le risque d’être mis en échec dans les urnes alors qu’il a une majorité confortable au Parlement.
On peut cependant prendre le pari que ce débat sur le référendum ne fait que commencer et qu’au lendemain de la manifestation de dimanche, ce sera l’argument principal des opposants au projet de loi.

Par GUILLAUME TABARD