Les deux finalistes de Pekin Express : «On aimerait fonder une famille!»

Leur amour a illuminé l’émission dont le dernier épisode a été diffusé le 18 juin. Rien ne prédestinait pourtant les deux Valaisannes à tomber amoureuses l’une de l’autre. Daisy aimait les hommes et Natascha n’était pas attirée par ce type de femme.

Elles pourraient poser pour une marque de dentifrice parce qu’elles ont toutes les deux un sourire et des dents superbes. Une jolie vitrine sportive, ces deux jolies jeunes femmes. Car il y a chez Na­tascha Novacek et Daisy Pinchemaille, 30 ans, du biscoteau et de l’endurance même si leur silhouette n’a rien à voir avec le cliché de la lesbienne carrée. «Aujourd’hui, les femmes qui aiment les femmes sont canon», se réjouit Daisy avec un sourire de défi, avec aussi une touche de Shakira dans la tignasse blonde frisée et le teint mat.
On ne les contredira pas, même s’il fallait quand même une sacrée condition physique pour se hisser en finale de Pékin Express le 18 juin dernier. Natascha a d’ailleurs joué au hockey au niveau national tandis que Daisy la pétillante est multiactivité: chant, danse, comédie, fitness, chorégraphie et prof de… sexy dance. Une activité moins sulfureuse que sa dénomination ne le laisse supposer: «On travaille la sensualité, la confiance. Etre sexy, c’est avoir confiance en soi», précise la Valaisanne, pour qui le mental dans l’émission de M6 était plus important que la force. Et du mental, cette jeune femme ne semble pas en manquer. Arrivée enfant avec sa mère à Sion, Daisy a connu la pauvreté d’une favela brésilienne, l’amour et la solidarité familiale qui fortifient le cœur, mais parfois le ventre vide avec «un café noir pour toute la journée».

Existence chahutée
«Ma femme, c’est une vraie locomotive, dit Natascha. Pékin Express m’a fait découvrir qu’elle pouvait déplacer des montagnes.» Ce qui peut être pratique quand on habite comme les deux complices à flanc de rocher de la colline de Valère. La vie de Natascha n’est pas sans relief non plus. Abandonnée par sa mère, meurtrie par ce secret de famille concernant l’identité de son père jamais connue, la jeune femme plus brut de décoffrage que sa compagne a grandi à Crans-Montana, près de son oncle et de sa tante. Quand elle les perd à 16 et 18 ans, c’est «comme si le Cervin m’était tombé sur la tête»! Les tatouages sur sa peau racontent à livre ouvert l’histoire d’une jeune femme qui s’est construit une carapace de BD pour moins souffrir: les initiales de ses parents adoptifs, le phénix sur la poitrine, l’oiseau mythique qui meurt et renaît de ses cendres, et le dernier en date, le D de Daisy.
Rien ne prédestinait pourtant ces deux-là à s’aimer. Natascha a fait son coming out à 16 ans, ne déviant pas de sa ligne affective alors que sa maman pensait que «ça passerait». Daisy était, elle, farouchement hétérosexuelle. «Je n’aurais jamais imaginé être attirée sexuellement par une femme, mon ex était basketteur, j’aimais les hommes plutôt virils.» Il y a trois ans, fraîchement séparée, et après avoir vécu quelques années à Paris, elle pousse la porte du bar Vida Loca à Sion. «Ce fut comme une révélation, dit-elle, évoquant ce premier regard sur Natascha. Je n’ai pas compris ce qui m’arrivait. Je l’ai pointée du doigt, j’ai demandé à un ami: «Tu la connais, elle est libre?» Daisy, élevée dans une culture d’origine où on peut stopper une série à la TV parce qu’un personnage est homo, mettra un certain temps à accepter ce bouleversement. D’autant que la foudre n’a pas touché Natascha de la même manière. Même si elle n’est pas restée insensible très longtemps au charme de Daisy.
«Pendant des semaines, j’ai prié, j’ai allumé des bougies en demandant à Dieu d’écarter cela de moi, confie cette dernière. Jusqu’à ce que je comprenne qu’aimer avec cette force, ça ne pouvait pas être mal!»

Changer les mentalités
Finalement, l’amour de Daisy et Natascha, sublimé au travers des épreuves de Pékin Express, aura peut-être été plus efficace pour faire évoluer les mentalités que des années de combat ou de protestations véhémentes pour les droits des gays ou des lesbiennes. Des mots d’ailleurs dans lesquels elles ne se retrouvent pas, estimant qu’on n’en a pas encore inventé d’assez jolis pour parler de l’amour entre deux femmes. Et quand des hommes viennent les draguer impudemment, elles savent remettre l’église au milieu du village, mais avec humour.
«Beaucoup de gens autour de moi pensent que je me suis tournée vers une femme parce que les hommes m’ont déçue. C’est encore un cliché, j’ai eu des hommes extraordinaires dans ma vie et je les ai beaucoup aimés. C’est encore un cliché stupide de croire que l’amour physique avec une femme est plus doux. Il y a des hommes délicats et des femmes brutales.» Sourire de Daisy, sourires complices des «amoureuses suisses», ainsi surnommées tout au long de l’émission de M6.
On les regarde marcher main dans la main dans les rues de Sion, se donner du «chérie, chérie» et du bisou sur la bouche le jour de la Fête-Dieu sous le regard conquis de la plupart des passants. «On vous adore, vous méritiez de gagner», lance une dame timide. «Vous étiez les meilleures, vous étiez les plus belles», glisse un motard barbu. A la terrasse d’une pizzeria, une Valaisanne bon teint vient se faire prendre en photo en leur compagnie. Une autre raconte qu’elle a suivi l’émission depuis son lit d’hôpital. Et quand on demande à une petite dame très fan si l’homosexualité des candidates l’a gênée, elle répond tout de go en fixant le journaliste dans les yeux: «Moi, ce qui m’énerve, ce sont les pédophiles!»

Devenir mamans
Pékin Express fut autant une traversée géographique qu’une découverte de territoires émotionnels, confient les deux ex-candidates, émues par le nombre de fans sur leur page Facebook (8000 à ce jour). Natascha, junior executive manager qui assiste l’agent de joueurs de hockey Gérald Métroz, avoue s’être adoucie au terme de cette expérience humaine et au contact de Daisy, dont la famille est devenue la sienne. Avec deux passeports suisses, des origines brésilienne et française pour l’une, allemande, autrichienne et polonaise pour l’autre, le monde est à elles. Elles fourmillent de projets, sont sollicitées de-ci de-là pour parrainer une manifestation, pour défiler dans une boutique en Valais ou à Paris. Et il y a le prochain album de Daisy dont on peut découvrir le single sur le web*. Enfin, sûrement, d’ici à trois ans, devenir l’une et l’autre mamans, parce qu’elles adorent les gamins. Daisy aimerait que ce soit Natascha qui porte leur premier enfant. «Elle n’a plus personne au monde, ce serait le début de sa nouvelle famille.»

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