Les « thérapies » de conversion bien présentes au Québec, selon l’Alliance Arc-en-ciel qui appelle à légiférer

Gabriel, Montréalais de 24 ans, a toujours su qu’il était homosexuel. Mais à force de s’entendre répéter que c’était « contre-nature », il a accepté de participer à des rituels d’« exorcisme » pour s’en délivrer. Des séances à 300 $ et pratiquées par un « prophète » pour sa communauté pentecôtiste, qui considérait Gabriel comme un « démon ». « Je ne pouvais pas vivre comme ça, je ne voulais vraiment pas être gay », se souvient-il. D’où sa première tentative de « conversion » à 12 ans.

« Je me suis fait crier dans les oreilles pendant 30 minutes. J’ai bu de l’huile d’olive. Il y avait quatre personnes qui me tenaient. C’était vraiment intense… J’ai pleuré de détresse tout au long. »

Mais, Gabriel était toujours homosexuel ! Alors, il a choisi de laisser « croire » à tous que « le mal » s’était évaporé. Et il a recommencé deux ans plus tard et puis encore à 18 ans, dans un groupe « d’ex-gays » en Ontario. « Ce qui était difficile, c’était d’avoir une attirance pour un gars et de se sentir mal, de se sentir coupable ».

Depuis, Gabriel a appris à s’aimer, soutenu dans ce « processus » par différents réseaux. Il ne s’est jamais senti aussi bien. Et s’il a un conseil à donner, c’est bien de s’accepter tel que l’on est ! « Tout le monde dans mon entourage me disait qu’on pouvait changer d’orientation sexuelle. J’ai tout essayé, sans succès bien sûr. »

Ce témoignage a été recueillis par l’Alliance Arc-en-ciel de Québec qui a présenté, ce jeudi 17 mai, un mémoire à la ministre de la Justice, Stéphanie Vallée, avec constats et recommandations, en vue de l’élaboration d’un Plan d’action gouvernemental de lutte contre l’homophobie et la transphobie.

« Nous voulons qu’il soit écrit noir sur blanc que « tout traitement visant à changer l’orientation sexuelle d’une personne » […] soit interdit, et ce, pour l’ensemble de la population », explique l’organisme, qui recommande un changement dans les lois.

« Le vide juridique entourant les thérapies réparatrices est un incroyable terrain de jeu, particulièrement lucratif, pour les homophobes affirmant agir pour le bien des valeurs familiales. Ces traitements ne doivent en aucun cas être présentés comme des services de santé, et nous exigeons qu’un professionnel qui se trouverait coupable d’un tel traitement pseudo-scientifique qui s’apparente davantage à de la torture psychologique perde le droit de pratiquer. »

L’Alliance réclame en outre une campagne de sensibilisation ciblée, davantage de vigilance dans les écoles à vocation religieuse, ainsi qu’un soutien aux victimes dans leurs démarches de reconstruction.

« Nous espérons grandement qu’il y aura des suites et surtout que l’histoire de Gabriel inspirera d’autres personnes à emprunter la voie de l’acceptation et l’affirmation de soi », s’est félicité l’organisme sur les réseaux.

Notons qu’en mars dernier et pour la première fois, le Parlement européen a condamné ces « thérapies », enjoignant dans son rapport annuel sur les droits fondamentaux dans l’UE, les pays à membres à légiférer. Seuls le Royaume-Uni, Malte et des régions espagnoles les ont interdites. La France pourrait suivre avec un texte de la députée LREM Laurence Vanceunebrock-Mialon.

Joëlle Berthout
stophomopobie.com