Levent Pişkin : Accusé de « propagande terroriste », l’avocat et militant LGBTI turc comparaîtra libre !

Déféré ce mercredi devant le procureur de Bursa, qui n’a pas réclamé de prolongation à sa détention, Levent Pişkin devrait être finalement libéré en attendant son jugement prochain.

Il avait été interpellé à son domicile dans la matinée du 14 novembre dernier, accusé d’avoir transmis à un magazine allemand des informations assimilables à de la « propagande terroriste » : une note manuscrite de son client, Selahattin Demirtaş, coprésident du « Parti de la démocratie des peuples » (Halkların Demokratik Partisi), pro-minorités et contre-pouvoir au président Erdogan, arrêté le 4 novembre et emprisonné avec plusieurs d’autres députés en raison de leur soutien présumé aux séparatistes kurdes.

A la faveur de « l’état d’exception » instauré depuis le putsch manqué du 15 juillet dernier, l’exécutif multiplie ainsi ses purges pour museler toute forme d’opposition.

Le HDP, troisième force politique du pays, a depuis limité ses contributions législatives malgré son entrée historique au Parlement qui a fait basculer en 2015 la majorité de l’AKP, le parti de Tayyip Erdogan.

Dans ces dérives, plusieurs milliers de magistrats ont par ailleurs été limogés. Hasard de calendrier, l’avocat devait justement participer le jour de son arrestation à la défense de dizaines de ses confrères placés en détention préventive.

Les associations ÖHD (juristes pour la liberté) et KaosGL, organisatrice de la « Semaine des fiertés d’Istanbul », dont Pişkin est membre, ont dénoncé son arrestation et les poursuites engagées : « un nouvel exemple des politiques d’isolation par emprisonnement », des pratiques totalement illégales et « une violation des droits d’avoir une défense et un jugement équitables ».

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Faisant part de sa profonde préoccupation quant à la situation des avocats en Turquie, « assimilés à leurs clients, en raison de l’exercice légitime de leur profession », L’Observatoire international des avocats en danger, l’OIAD, a également publié mercredi un communiqué, appelant à une mobilisation et les autorités turques « à se conformer aux conventions internationales », le pays étant signataire de la CEDH.

Levent Pişkin a déjà deux fois été condamné pour avoir « traité » Erdogan de « PD ». Il avait associé dans un message sur twitter le nom du président turque avec « homo » : Une « provocation grave » à l’égard du pouvoir selon les juges, une « qualité » pour le militant. « Tout le monde me connait toutefois depuis cette affaire, ce qui m’expose à des menaces. Mais rien d’extraordinaire, nous sommes nombreux à les subir », expliquait-il en juin dernier dans le bulletin des avocats parisiens.

Déplorant l’insécurité et l’absence en outre de protection légale pour les personnes LGBTI en Turquie, il a défendu et obtenu la libération de tous les manifestants interpellés cette année lors de la Transpride, interdite. Et témoigné dans la presse, après la mort brutale de la jeune activiste transgenre Hande Kader, dont le corps calciné avait été retrouvé le 8 août 2016 sur le bas-côté d’une route, à Istanbul. Elle s’était illustrée en s’interposant entre la police et des participants à la GayPride, annulée en 2015 et durement réprimée par les autorités. Sa disparition avait soulevé une vague d’indignation à l’international.

Terrence Katchadourian
stophomophobie.org