La justice dira le 20 mai si la une de Minute « Mariage homo : bientôt ils vont pouvoir s’enfiler… la bague au doigt » et « Sida : malgré les risques ils vont vous donner leur sang » relève ou non de l’homophobie.
L’hebdomadaire d’extrême droite était poursuivi par l’association SOS Homophobie pour injure et provocation à la haine devant le tribunal correctionnel de Paris, pour ce numéro de juillet 2012, au début du débat houleux sur le « mariage pour tous« .
Les titres s’étalaient sur fond de photo de deux hommes de dos, vêtus seulement de sous-vêtements en cuir lors d’une « gay pride », tenant le drapeau arc-en-ciel des militants LGBT.
Pour Me Kevin Grossmann, avocat de l’association, l’hebdo veut ainsi « ramener l’homosexualité à une seule et unique chose, la sexualité. Si les personnes homosexuelles veulent se marier, ce n’est pas parce qu’elles s’aiment, pour pouvoir fonder un foyer, non c’est pour pouvoir enfin s’enfiler ».
Relevant la phrase d’un article qui s’interroge, à propos de la question de la filiation une fois le mariage ouvert aux personnes de même sexe, « et pourquoi pas Médor ou le chat du voisin ‘ », Me Grossmann estime que Minute associe les homosexuels aux pratiques zoophiles.
Quant à la référence au Sida, « les homosexuels sont présentés comme des éléments pathogènes », estime l’avocat qui demande « des dommages et intérêts exemplaires ».
Pour la représentante du parquet, si cette une est « choquante et utilise un terme particulièrement grossier« , l’assimiler à une injure à toute la communauté gay est « un saut intellectuel ». « Faire référence à la sodomie, qui est une pratique absolument pas réservée à la communauté homosexuelle, ne la stigmatise pas globalement ».
Quant à la référence aux animaux à propos de la filiation, dans le déroulé de l’article « dire qu’elle prête à la communauté homosexuelle des tendances zoophiles est une extrapolation de mauvaise foi ».
Finalement, pour la procureur seule reste la phrase « Sida: malgré les risques ils vont vous donner leur sang », et plus particulièrement ce pronom qui « ramasse toute la communauté homosexuelle ». Et elle estime que c’est sur ce seul point que le tribunal pourra « entrer en voie de condamnation ».
Me Frédéric Pichon, en défense, reconnaît « un titre provocateur et aguicheur, gras, évidemment pour attirer le chaland ». Accusant le plaignant de « charcuter les citations », il juge que l’hebdomadaire « n’excède pas les limites de la liberté d’expression ».
« Si on ne peut plus dire que la filiation doit être liée à la parentalité, alors il faut interdire les slogans de la manif pour tous ». Quant au « ils », « il faudrait démontrer que ce sont tous les homos, pas juste les militants. Or la photo, ce sont des militants, dans une manif militante ».