Après une prépa HEC, suivie d’une école de commerce et d’un emploi en tant que banquier, Nino Arial, qui aura en parallèle étudié le théâtre au cours Florent et tenté les scènes ouvertes parisiennes, décide à 25 ans de se consacrer à la scène, « 39h/24h et 12 jours sur 7, avec les tracas de sa génération comme principale source d’inspiration ».
Harcèlement scolaire, conditions de travail et de vie, il enchaîne également les vidéos sur les réseaux. Mais ne vous fiez pas à son sourire charmeur, Nino est impertinent, il a beaucoup de choses à dénoncer et n’épargne personne, pas même les homophobes. Il aura pourtant bien tenté de sonder le problème mais sans jamais pouvoir leur attribuer quelque circonstance atténuante.
« On défend les gays mais faut aussi se mettre à la place des antis. Ils ont surement leurs raisons », dit-il, notamment quand ils qualifient l’homosexualité de « contre-nature ».
« Ils ont raison. Tout le monde sait qu’à la base, on est tous nés hétéros. C’est après que certains décident de devenir homos. Ils prennent rendez-vous au bureau des gays, dans un immeuble tout rose, situé dans le marais, qui sent le poppers et où tous écoutent du Britney Spears. Et puis là, ils peuvent choisir leur forfait sexualité, avec options, passif, actif… Faut se faire plaisir, sans compter à la dépense. Dans les deux cas, on se fera de toute façon emmerder par des cons », assure-t-il, taclant dans la foulée « la Manif pour tous… ceux qui devraient s’occuper de leur cul, plutôt que celui des autres ! »
Mais ça faisait un peu long pour le titre, « alors ils ont enlevé deux, trois mots à la fin, c’était plus parlant. Surtout que deux personnes du même sexe qui s’aiment, c’est choquant. » En 2017, avec Tinder, plans cul et divorces, « ça n’existe plus les personnes qui s’aiment. »
La vidéo fait un carton mais les homophobes n’apprécient pas. Trop d’ironie sans doute et leurs arguments s’étiolent.
« J’estime que l’homosexualité ne doit pas être défendue étant donné qu’elle n’a rien d’anormale », souligne Nino. Et « dire que les homos ont le droit de s’aimer revient à dire que les humains ont le droit de s’aimer. » En ce qui me concerne, je tenais donc surtout à montrer « l’absurdité totale de l’homophobie. »
Pour la petite histoire, Nino est parti vivre quelques mois à New York. « J’étais étudiant », nous confie-t-il. « Je travaillais illégalement et je n’avais pas assez d’argent pour payer un loyer. J’ai alors commencé à vivre semaine après semaine chez des gens qui me proposaient de me loger pour m’aider quelques jours, jusqu’à ce que je rencontre la personne la plus généreuse que je connaisse à ce jour : Gino. Il est homosexuel. Il m’a d’abord proposé de passer une semaine chez lui gratuitement sachant pertinemment que j’étais hétéro. Et je n’en suis jamais reparti et il ne m’a jamais demandé le moindre centime, ni même fait de propositions ou de sous entendus. Nous étions simplement amis et cette relation n’a fait que se renforcer. J’ai vécu ainsi avec lui, partagé ses moments de bonheurs, découvert une communauté gay extrêmement attachante, ouverte et très drôle. Mais j’ai aussi entendu ces réflexions dans les bars, ce sentiment de rejet parfois, cette souffrance face à « l’homophobie ordinaire » , les petites blagues qu’il subissait du matin au soir. Et cette période a profondément changé ma vision de la communauté. Ils étaient des gens normaux mais qui menaient un combat de façon un peu excessive. Mais je n’avais pas conscience de toute la complexité d’évoluer dans un mode qui ne te considère pas comme « normal », sans compter la difficulté de faire des rencontres. J’avais moi-même du mal à trouver la « femme idéale » et pourtant je cherchais juste une compagne hétéro, dans cette moitié de la population mondiale. Beaucoup plus facile. Tandis que dans cette quête de l’amour, mon ami devait lui trouver un homme, gay, qui lui plaise et accepte de s’affirmer. Et c’est avec une immense joie que je serais témoin de son mariage l’année prochaine. Je ne suis ni gay, ni bi, ni étais jusque-là un militant de la cause. Mais puisqu’il y a un mot pour désigner les gens qui n’aiment pas les homosexuels. J’ai cherché un mot pour les personnes comme moi qui n’aiment pas les homophobes. Et je confirme. Je suis officiellement « connarophobe ». Phobie qui inclut les racistes, les haters, misogynes, intolérants, les féminazistes aussi, les mecs violents, ceux qui ont l’alcool mauvais, et puis tous les autres cons. »
Une bonne leçon à tous les pseudos humoristes qui gâchent leur talent en sombrant dans l’immonde et la parodie, alors que les LGBT sont persécutés dans au moins 75 pays et passibles, dans 13 états, de la peine capitale.
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Un artiste frais et sans complexe à découvrir, actuellement au Sentier des Halles à Paris.
Terrence Katchadourian
stophomophobie.com