À proprement parler, l’homophobie signifie la « peur de son semblable », et non pas une aversion à l’égard des homosexuels. Le préfixe, comme la racine, provient du grec « homoios » et non, selon la croyance répandue, du latin homo « homme ». Mais il fait bien référence à la discrimination envers des personnes, des pratiques ou des représentations homosexuelles ou supposées l’être, et plus communément aujourd’hui : au mépris envers l’ensemble de la communauté LGBT.
Le terme serait apparu pour la première fois dans un article de la revue pornographique américaine Screw daté du 23 mai 1969, évoquant la crainte pour certains hétérosexuels d’être assimilés ou devenir gay. Le psychologue Kenneth Smith l’introduit en 1971 dans son rapport, Homophobia : a tentative personality profile, puis Georges Weinberg en 1972, dans son livre Society and the Healthy Homosexual, lui conférant ainsi une dimension davantage scientifique.
Longtemps considérée comme une pathologique, ce n’était plus désormais l’homosexualité donc le problème, mais bien sa crainte et son rejet. Et c’est avec ce sens que l’homophobie entrera à la fin des années 1990 dans les dictionnaires courants de la langue française.
Un phénomène multiple dont les différentes manifestations ne seraient pas toutefois de même nature. Certains postulent en particulier la présence originelle et universelle de l’homosexualité ou de la bisexualité, donc son refoulement par ceux et celles qui se considèrent hétérosexuels.
Mais elle comporte nécessairement une dimension sociale et juridique. Elle est directement nourrie par des normes sociales voire institutionnalisées. Elle se traduit politiquement et positivement par l’hétérosexisme, notion mise en avant par le militant Louis-Georges Tin, impliqué dans la lutte contre l’homophobie et le racisme. Il estime que l’homophobie individuelle serait un fruit de l’hétérosexisme, forme d’homophobie sociale consacrant la suprématie du modèle hétérosexuel qui est présenté comme seul modèle existant, unique norme sociale de référence. Avec la notion d’hétérosexisme, le problème de l’homophobie prend un tournant politique indéniable. Ainsi, norme sociale et juridique s’alimentent-elles mutuellement pour conférer à l’homosexualité un statut marginal. Le discours hétérosexiste pourrait bien correspondre au discours homophobe nouveau, qui sous couvert de ne pas traduire directement un sentiment irrationnel de rejet des personnes homosexuelles, justifie pourtant les inégalités juridiques et sociales existant entre le couple hétérosexuel et le couple homosexuel.
Dans la situation traditionnelle, le sexe du partenaire n’est pas une variable négociable. Les familles marient leurs fils et filles avec l’objectif explicite de la reproduction biologique, cela empêche les couples de même sexe. Loin de toute préoccupation idéologique, il s’agissait de la survie de la famille. C’est ainsi que la famille chrétienne européenne pratiquait la même hétérosexualité obligatoire que les familles traditionnelles des autres continents.
En dehors du conjoint choisi par la famille, toute sexualité est proscrite. Là aussi, il s’agit d’un objectif familial : faire en sorte que tous les enfants naissent à l’intérieur des cadres décidés par elles. L’homosexualité se trouve ainsi hors la loi, au même titre que l’hétérosexualité extra-conjugale.
L’histoire récente montre toutefois une cohabitation qui tente à se pacifier, même si le discours homophobe a connu, avec les débats houleux suscités par l’ouverture du mariage pour tous, une traduction physique violente. Il se manifeste aussi de façon désormais plus insidieuse, apparaissant comme une violence discursive banalisée, un harcèlement quotidien qu’il est impératif de dénoncer.