La Société libanaise de psychiatrie et l’Association libanaise de psychologie ont mis la lumière sur les deux communiqués qu’elles ont récemment publiés, et qui stigmatisent l’usage de thérapies réparatrices pour les homosexuels.
L’homosexualité est loin d’être tolérée au Liban, et les abus à l’encontre des personnes homosexuelles font partie, malheureusement, d’un triste quotidien. Pire encore, de nombreux médias continuent de donner tribune à des personnes soi-disant « psychologues » ou « psychiatres », qui s’avèrent être finalement de simples charlatans qui prétendent pouvoir « guérir » l’homosexualité.
Alertée par cette propagande qui ne peut que nuire à leur métier, mais aussi à la société, la Société libanaise de psychiatrie (LPS) s’est empressée de publier un communiqué pour faire le point sur ce sujet délicat, suivie par l’Association libanaise de psychologie (LPA). Dans leurs textes*, les deux organisations ont affirmé que l’homosexualité n’est qu’une orientation sexuelle qui ne peut être considérée comme pathologie, qu’elle ne requiert aucun remède, qu’elle n’a pas de cause précise, et que les thérapies réparatrices n’ont prouvé aucune efficacité à cet effet.
Mercredi soir, les deux associations, réunies le temps d’une table ronde par l’ONG Helem qui protège les droits des homosexuels et de la communauté LGBT, ont tenu à mettre l’accent sur leurs récentes allégations, soutenues par LebMASH, l’association médicale libanaise pour la santé sexuelle.
« Il s’agit d’une affaire de haute importance, tant au niveau de la psychologie qu’au niveau des droits de l’homme, a affirmé Carole Saadé, représentant LebMASH. Il n’existe aucune preuve de l’efficacité d’une thérapie réparatrice. Bien au contraire, cette dernière peut causer des troubles psychologiques. Il est important de diffuser cette culture et ces notions au grand public, pour pouvoir enfin aboutir à mettre fin à la discrimination contre les homosexuels en société. » Dr Saadé a aussi mis l’accent sur la nécessité de différencier entre orientation sexuelle et comportements sexuels pouvant résulter de facteurs divers, ces derniers pouvant être traités médicalement.
De son côté, Leila Akouri Dirani, présidente de la LPA, a estimé qu’« il était nécessaire pour l’association de corriger l’image donnée par des personnes pas très habilitées pour parler de psychologie, et qui ont jugé à travers les médias que l’homosexualité est pathologique et l’on peut donc y remédier ». « Nous, psychologues, disons pourtant que ces personnes homosexuelles peuvent être sujettes à des pressions familiales ou sociales qui peuvent leur créer des problèmes psychologiques auxquels on peut remédier, comme toute autre personne qui nécessite d’être suivie », a-t-elle poursuivi. Et d’ajouter : « Nous travaillons avec les gens pour qu’ils soient libres dans leurs choix. » Dr Akouri Dirani a par ailleurs déploré l’impossibilité de poursuivre en justice « toute personne qui se dit psychologue et colporte ce genre d’hérésies », « une loi d’organisation du métier n’ayant pas encore été promulguée ». Rappelant que la LPA est une ONG et non pas un syndicat, elle a pourtant certifié que les psychologues membres de la LPA étaient tous d’accord sur le texte publié, ne jugeant pas l’homosexualité comme étant une maladie.
Échos positifs
Pour sa part, Georges Karam, secrétaire et porte-parole de la LPS, a assuré que l’association a voulu clarifier certaines fausses notions répandues en société, à travers son communiqué, comme celles blâmant l’éducation ou la famille si l’un des leurs s’avérait être homosexuel, rappelant que de nombreux chercheurs scientifiques internationaux qui prêchaient la thérapie de conversion se sont finalement rendus à l’évidence qu’elle n’était tout simplement pas efficace. Dr Karam a en outre révélé que les récentes positions de la LPS et de la LPA ont reçu de nombreux échos positifs à l’échelle internationale.
Cette mise au point scientifique libanaise sur l’homosexualité intervient alors que le débat sur l’article 534 du code pénal qui criminalise l’homosexualité est toujours ouvert. Le texte ne cite pas l’homosexualité mais punit toute relation sexuelle contre nature. À l’heure où de nombreux activistes luttaient pour évincer ce texte, d’autres ont tenté de lui trouver une explication nouvelle pour s’en débarrasser, en estimant que l’homosexualité n’est pas contre nature. Pour la science, toutefois, la question ne peut être posée de la manière suivante. « Le terme contre nature est flou, explique Georges Karam. S’il signifie pathologie, le texte de loi peut alors être considéré condamnable par la science, mais si le terme signifie contraire à la majorité en termes de statistiques, ou n’assurant pas la continuité de l’espèce, il est difficile de pouvoir alors expliquer ce texte différemment à travers une approche scientifique. » « En sciences, la notion de naturel n’existe pas ; nous parlons de cas normal et de cas pathologique », a pour sa part affirmé Carole Saadé.
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