« Ces six derniers mois ont été durs, on nous a traînés par terre mais nous sommes toujours debout sur nos talons ». Comme les « soeurs de perpétuelle indulgence » en robe longue, coiffe et paillettes, des milliers ont convergé vers le Marais, quartier parisien réputé pour ses nombreux bars homosexuels, pour fêter la loi leur permettant de se marier.
Dès le vote solennel à l’Assemblée nationale, des centaines de personnes ont commencé à se réunir devant la mairie d’arrondissement, tout près de la Seine, pour écouter les discours des élus et militants associatifs, une coupe de champagne à la main, avant de rejoindre les bars et les petites rues du quartier.
Devant les terrasses bondées, des couples s’embrassent, s’étreignent et dansent sur fond de musique techno.
« Il y a encore beaucoup de choses à faire mais ce soir c’est la fête », raconte Alexandre Dousson, directeur du bar Le Spice devant lequel flotte un immense drapeau arc-en-ciel porté par des ballons.
« Aujourd’hui c’est la liesse, c’est une ambiance de coupe du monde », ajoute cette figure de la communauté homosexuelle.
Hélène, 27 ans « plane »: « On se regarde et on se sourit bêtement, on se dit qu’on va enfin pouvoir se marier ». « C’est la fin d’une homophobie d’Etat », estime à ses côtés Coralie, 26 ans.
« Enfin on y est, on attend ça depuis si longtemps! C’est le moment où on peut en profiter. Quel bonheur! A force de voir tous les gens contre, on avait fini par avoir peur que la gauche recule », confie Serge au bras d’Éric, tous les deux un verre à la main.
Au milieu de la foule, soudain Christophe Girard, le maire PS de l’arrondissement, fend la foule et tout le monde le congratule. « Aujourd’hui, on boit un coup et demain on boira encore pour vos mariages », lance-t-il à des couples tout sourire.
Une voiture de police qui patrouille parvient difficilement à se frayer un passage dans les rues inhabituellement bondées pour un mardi soir. Juste derrière, un livreur passe en klaxonnant le bras levé en signe de victoire, acclamé par la foule.
« C’est beau, c’est un moment de générosité, de la France envers nous, nous allons pouvoir faire de la famille quelque chose d’un peu nouveau, de plus ouvert », confie, très ému, Gilles, 46 ans.
« Et vous, vous avez prévu ça pour quand? »: Déjà, des couples se prennent à imaginer les futures agapes.
« Jusqu’ici, on n’avait jamais pensé au mariage mais on s’est tellement battu pour, qu’on finit par en avoir envie et ça devient un geste militant », commente Stéphane, 32 ans.
« On va enfin pouvoir poser une date », se réjouit Sébastien Deporte, 40 ans, en couple depuis un an. Avec son compagnon, Bruno Ribeiro, 32 ans, ils sont venus au Marais, « un endroit symbolique » pour une « mini-tournée des bars » entre amis. Mais « d’autres sont déjà partis pour faire la fête toute la soirée », sourit-il.