Les masques ont été remisés au placard. Leurs torses d’habitude grimés de messages contre la loi sur le mariage gay sont dissimulés sous leur plus belle chemise. Devant la 12e chambre du tribunal correctionnel de Paris, les quatre militants du collectif Hommen jugés pour avoir perturbé la finale de Roland-Garros, ne semblent pas avoir la même assurance que ce dimanche de juin où ils ont agité des fumigènes et des banderoles sous le regard médusé de Rafael Nadal. Ils sont accusés de « violence », « violence avec arme par destination » et « dissimulatin de visage ».
« On craint un nouveau procès politique avec une justice à deux vitesses pour les militants de la Manif’ pour tous », lâche Julien*, 30 ans, quelques minutes avant d’entrer dans la salle d’audience. Tous ont à l’esprit le cas de Nicolas Bernard-Buss, le militant de la Manif’ pour tous qui a passé 19 jours à Fleury-Mérogis avant que sa peine soit transformée en appel en une simple amende. « On a appris de ses erreurs, relativise Louis, 29 ans, interpellé à 16 reprises depuis le début des manifestations et qui a déjà essuyé 122 heures de gardes à vue. Il a été insolent avec la Cour et c’est ce qui lui a sûrement valu une peine aussi lourde. On ne refera pas les mêmes fautes ».
Le parquet fait appel
Ils n’en auront pas l’occasion. Après 20 minutes d’une audience technique, Armand, Ambroise, Louis et Julien ont vu les charges retenues contre eux abandonnées par la Cour sur un point de procédure. Le tribunal a en effet prononcé la nullité des gardes à vue. « Nos clients se sont vus notifier leurs droits au bout de 3h-3h30 alors que le code de procédure pénal précise que cela doit être fait immédiatement », explique Me Frédéric Pichon, l’avocat d’un des quatre prévenus. Cette décision entraîne l’annulation du procès.
La Cour n’abordera donc pas les questions de fond: comment ces militants ont fait entrer des fumigènes et des banderoles dans le stade de Roland-Garros? Ont-ils eu des « contacts » à l’intérieur qui les ont aidé à investir les deux cours principaux du stade? Qui a eu l’idée de cette action? Le parquet a déjà annoncé sa volonté de faire appel de cette décision.
Une chose est sûre, cet après-midi au palais de justice n’a entamé en rien leur détermination à lutter contre la loi Taubira. « On ne lâche rien », lâche Armand, 28 ans, tout sourire quelques secondes à peine après l’annonce de la nullité des faits. « Le seul moyen de m’empêcher de recommencer aurait été de me faire mettre derrière les barreaux, renchérit Louis. Et encore, pour un Hommen qui tombe, il y en a dix derrière ».
* Ce prénom a été modifié
Par Caroline Politi REUTERS/Vincent Kessler