Deux mois de prison avec sursis et deux ans d’inéligibilité : c’est la peine à laquelle Richard Jacob, conseiller municipal FN d’Auxerre, a été condamné pour violence et incitation à la haine en raison de l’orientation sexuelle. Fabrice Donat, président de l’association LGBT Traits d’union, a assisté à l’altercation au cours de laquelle les faits se sont produits. Il revient sur ces événements.
Je me félicite que Richard Jacob, conseiller municipal FN à Auxerre, ait été condamné à six mois avec sursis et deux ans d’inéligibilité pour violence et incitation à la haine en raison de l’orientation sexuelle.
Le 16 février, à la suite d’un rassemblement en faveur du mariage pour tous sur la place de la mairie, il avait insulté les quelques manifestants qui étaient restés, et même agressé physiquement trois d’entre eux.
Nous étions dans la légalité la plus totale
Ce jour-là, l’association dont je suis le président avait organisé un rassemblement pour le mariage pour tous sur la place de la mairie. Nous avions toutes les autorisations légales, et nous n’étions qu’une trentaine. Notre manifestation était pacifique : j’ai fait un discours, d’autres personnes ont pris la parole, puis nous nous sommes dispersés.
Je suis resté pour discuter avec les quelques personnes qui n’étaient pas parties. À ce moment-là, nous avons vu Richard Jacob arriver en hurlant.
Je ne savais même pas qui il était. Il a d’ailleurs refusé de livrer son identité, malgré mes questions. C’est finalement un passant qui l’a reconnu et nommé, seulement après qu’il nous a agressé.
Pour lui, notre autorisation préfectorale ne concernait que la place, et nous n’avions pas le droit de rester sur le parvis de la mairie, ces quelques marches que toutes les manifestations utilisent.
Il nous a insulté, nous a dit « les pédés, les tantouzes, au bûcher » ou encore « vous allez crever ». Il a aussi poussé violemment deux personnes des marches (l’une d’elles s’est tordue la cheville), et a envoyé un coup de pied au visage d’une jeune fille de 17 ans.
Heureusement, les policiers, alertés par des badauds, sont rapidement intervenus et l’ont calmé. Il est bien revenu à la charge lorsque, à la demande des journalistes de France 3, nous sommes montés sur le parvis pour faire des images. Cette fois-ci, les policiers ont pris son identité et l’ont convaincu de rentrer chez lui.
Des passants nous ont conseillé d’aller déposer une plainte collective, mais nous avons choisi de le faire séparément. Je l’ai fait en tant que représentant de mon association, puis les autres victimes ont suivi.
Nous ne voulions pas être jugés comme un « package », parce qu’il s’agissait bien de plusieurs agressions, et nous voulions que chacune d’entre elles soit reconnue.
Une condamnation satisfaisante
Le tribunal a donc condamné Richard Jacob à six mois de prison avec sursis et deux ans d’inéligibilité.
La peine de sursis n’est pas une surprise, et personne n’a d’ailleurs cherché à ce qu’il aille en prison.
En revanche, nous nous réjouissons de la peine d’inéligibilité qui a été prononcée. Auteur d’une agression homophobe reconnue, il ne pourra plus se présenter à des élections pendant cette période.
Il a également été condamné à verser des dommages et intérêts aux trois victimes, pour préjudice physique (1.000 euros au total) et préjudice moral (1.500 euros), ainsi qu’à payer une partie de leurs frais de procédure (450 euros). De même, il a dû verser un euro symbolique, pour dommages et intérêts, aux associations qui s’étaient constituées parties civiles.
Ce sont d’ailleurs quasiment les peines que la procureure de la république avait requis.
C’est une victoire que toutes les victimes aient été reconnues. Nous voulions que cette condamnation soit la preuve que les élus ne peuvent pas faire n’importe quoi, comme ils le veulent. La décision est d’autant plus importante dans un contexte d’homophobie croissante et décomplexée qui profite à l’extrême droite et au FN.
Par Fabrice Donat
Président de l’association Traits d’union
Propos recueillis par Johanna Jacquot-Albrecht
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