Dans les jours qui ont suivi la promulgation du texte, plusieurs députés et sénateurs de l’UMP et de l’UDI ont cosigné un « manifeste pour la famille ».
Que fera l’UMP de la loi sur le mariage pour tous en cas de retour au pouvoir? La question, qui divise les rangs du parti, n’est toujours pas tranchée deux mois après l’adoption du texte. Officiellement, tout est encore ouvert. Au plus fort de la bataille parlementaire, Jean-François Copé avait concédé: «Il nous faudra certainement réécrire une partie du texte». Une position suffisamment ouverte pour parer à tous les cas de figure au moment de la présidentielle et des législatives de 2017.
Mais beaucoup des plus farouches opposants à la loi de Christiane Taubira n’entendent pas s’arrêter à une déclaration de principe aussi équivoque. Dans les jours qui ont suivi la promulgation du texte, plusieurs députés et sénateurs de l’UMP et de l’UDI ont cosigné un «manifeste pour la famille». «Le débat n’est pas clos parce que chacun sait que “ce qu’une loi a fait, une autre peut le défaire”, estiment les 88 cosignataires. Le débat n’est pas clos parce que personne ne peut se satisfaire des conditions dans lesquelles cette loi a été imposée au peuple français.»
Parmi les signataires, on retrouve les plus assidus opposants au texte dont les députés Marc Le Fur, Philippe Gosselin, Hervé Mariton, Jacques Myard ou les sénateurs Raymond Couderc et Bruno Retailleau. L’UDI est notamment représentée par les députés Charles de Courson et Jean-Christophe Fromantin. Tous prennent «l’engagement» de revenir sur la loi «en abrogeant notamment les dispositions relatives à l’adoption, ainsi que la circulaire légalisant le recours à la gestation pour autrui». L’adoption et pas le mariage en soi? «C’est implicite, explique Hervé Mariton. Il est évident que nous nous engageons à revenir sur le mariage à proprement dit.»
Pour Thierry Mariani, signataire de l’appel, «il est impératif de dégager une position globale sur cette question à l’UMP». «Quand nous sommes dans l’opposition, nous prenons des engagements qui ne sont pas suivis de faits une fois aux affaires», déplore le député en expliquant que la droite s’était engagée à abroger le pacs, les 35 heures ou à mettre en place de «vrais quotas migratoires». «La montée du Front national est autant due à la radicalisation de certains de nos électeurs qu’à notre incapacité à tenir nos promesses», juge l’ancien ministre. «À force de faire campagne à droite et de gouverner au centre, voilà le résultat», estime l’animateur de la Droite populaire.
Une porte de sortie
Pour Geoffroy Didier, cofondateur de la Droite forte, l’UMP doit «offrir une porte de sortie politique» au mouvement. «On ne peut pas s’opposer politiquement au projet de loi et une fois le texte devenu loi, expliquer que nous ne ferons rien de plus», estime-t-il en demandant l’organisation d’un référendum général sur la famille dans lequel les questions du mariage et de l’adoption seraient posées. Le référendum ne remettrait pas en cause «les mariages et les adoptions déjà effectués», précise-t-il.
D’autres n’ont cependant pas l’intention d’attendre un hypothétique retour au pouvoir de la droite pour agir. Christine Boutin entend placer la question au cœur de la campagne des européennes en 2014 en montant ses propres listes. Les collectifs antimariage ont également l’intention de peser sur la campagne des municipales en mars prochain. «C’est grotesque de vouloir transformer les élections européennes en élection sur le mariage pour tous», estime Thierry Mariani. «C’est de la récupération. Ce combat n’est pas un fond de commerce, s’insurge également Geoffroy Didier. Il ne faut pas prendre les gens pour des imbéciles.»
Hervé Mariton, qui partage ces réticences, estime que l’idée ne prospérera pas. Il rappelle d’ailleurs que les opposants à la loi Taubira n’ont eu qu’«un faible impact» sur la primaire qui a désigné Nathalie Kosciusko-Morizet candidate UMP à la mairie de Paris.
Beaucoup à l’UMP craignent avant tout que la réouverture du débat sur le mariage pour tous ne ravive des fractures internes. Promettre de réécrire voire d’abroger le texte ne séduit pas tout le monde, y compris parmi ceux qui ont voté contre la loi. «Nous avions déjà pris des positions de ce type-là au moment du pacs. Nous ne sommes pas revenus en arrière», avait ainsi expliqué Luc Chatel à l’issue des débats. «Pour reconquérir le cœur des Français nous devons être crédibles. Je ne crois pas qu’on reviendra en arrière (sur le mariage pour tous)», avait ajouté le numéro deux de l’UMP en avouant être «réservé sur cette stratégie».
«Il fallait avancer sur l’union homosexuelle», avait pour sa part expliqué Nathalie Kosciusko-Morizet en regrettant l’«erreur» de l’ancienne majorité qui n’avait pas tenu «la promesse de Nicolas Sarkozy en 2007 de faire l’union civile et d’organiser la vie des enfants élevés par des couples homosexuels». Preuve que dans la majorité ou dans l’opposition, les promesses électorales sont à manier avec précaution.