Les députés, qui sont entrés mardi dans leur deuxième semaine d’examen du projet du mariage homosexuel, se sont enfoncés dans une guerre de tranchées, l’opposition faisant durer les débats sur les termes de « père » et « mère« , et la majorité donnant des signes d’impatience.
A la reprise de la séance, l’UMP a recommencé à batailler contre l’article 4 qui, à l’origine, dressait une longue liste des dispositions du code civil où les termes de « père » et de « mère » disparaissaient au profit du terme de « parents » –« 150 occurences », avait compté Hervé Mariton (UMP).
Pour pallier cet inconvénient, la commission des Lois a réécrit l’article en se contentant de préciser que, généralement, les termes de « père et mère » devaient être compris comme celui de « parents », sans qu’il y ait besoin de modifier le code civil.
Hervé Mariton (UMP) a cependant tenu à prendre cette réécriture en défaut, prenant en exemple un article du code civil que l’officier d’état civil devra lire aux futurs mariés de même sexe et dans lequel il est dit que l’autorité parentale appartient au père et à la mère jusqu’à la majorité de l’enfant.
« Nous ne voulons pas que les officiers d’Etat civil se ridiculisent », a lancé le député de la Drôme.
La ministre de la Justice, Christiane Taubira, a souligné que le choix avait été fait par la commission des Lois de l’Assemblée de retenir une « disposition interprétative » sur différents mots. « Et ne faisons pas semblant de croire que l’officier d’état civil par exemple ne serait pas capable d’interpréter dans un cas précis éventuellement », a-t-elle lancé.
Devant les 187 amendements déposés par l’UMP sur l’occurrence des termes « père » et « mère », Olivier Dussopt (PS) a suggéré, en vain, de ne faire qu’un seul débat pour raccourcir les débats.
De nombreux députés de gauche ont du reste marqué leur lassitude, voire leur impatience, face aux milliers d’amendements et aux multiples rappels aux règlements et suspensions de séance émanant de l’UMP.
« Au bout d’un moment cela devient physiquement insupportable », expliquait dans les couloirs Jérôme Guedj (PS), à la faveur d’une suspension de séance. Par ailleurs, les députés PS ne se sont pas privés de faire référence au vote des députés britanniques favorable au mariage homosexuel survenu en fin de journée, provoquant l’agacement de l’UMP.
« Vous évoquez en permanence l’Angleterre conservatrice! Vous en êtes réduits à faire appel à ceux que vous dénoncez par ailleurs, les libéraux, super libéraux, ultralibéraux, qui sont peut-être dans leur logique mais ce n’est pas la nôtre. Vous vous inspirez de monarchies ultralibérales », a critiqué Marc Le Fur (UMP).
Dans la séance du soir, des députés UMP ont demandé de « stopper les débats » au vu d’informations de presse selon lesquelles le futur projet de loi sur la famille ne comprendrait pas la procréation médicalement assistée (PMA). Le patron des députés PS Bruno Le Roux leur immédiatement a rétorqué de « faire la loi à partir du texte » examiné et « pas du journal de Monsieur Dassault » en allusion au Figaro.
Ils ont aussi réclamé sans relâche la publication de l’avis du Conseil d’Etat sur le projet de loi. Cet avis est confidentiel et ne peut être rendu public que par décision du Premier ministre, a expliqué Christiane Taubira. Une publicité qui est toujours exceptionnelle, a rappelé Alain Vidalies, ministre chargé des Relations avec le Parlement.
« Tout a été dit, il n’y a pas un argument nouveau. Nous appelons donc les députés de l’opposition à faire preuve de bon sens, d’esprit raisonnable pour qu’on puisse passer à d’autres sujets », a déclaré pour sa part à la presse François de Rugy, co-président du groupe écologiste.
Devant l’impatience et la lassitude de la majorité, Christian Jacob a affirmé que son groupe ne s’était « nullement fixé de date » et avait bien l’intention de présenter ses amendements jusqu’au bout.
L’ancienne députée Christine Boutin, qui fut à l’Assemblée la pasionaria de la lutte contre le Pacs il y a quinze ans, a assisté à cette séance.
Fait notable mardi, le président de l’Assemblée, Claude Bartolone (PS), au perchoir pratiquement sans discontinuer depuis le début, s’est absenté pour fêter le Nouvel An chinois, comme prévu à son agenda et a laissé la place à Christophe Sirugue (PS) pour la soirée.
Le réseau social Twitter s’est de nouveau invité dans l’hémicycle, par l’intermédiaire d’une photo mal légendée d’un député socialiste jouant au scrabble dans l’hémicycle en plein débat et re-diffusé via le compte d’un député UMP.
La séance a été levée à une heure du matin mercredi.