Sur le mariage homosexuel, la parole est désormais au Sénat, où l’adoption du projet de loi devrait se jouer à une poignée de voix du fait de l’étroitesse de la majorité de gauche.
Le débat débutera le 2 avril. Il devrait durer « au moins une semaine et demie », mais « il n’y aura pas de limite » de temps, a annoncé mardi Alain Vidalies, ministre des Relations avec le Parlement.
La date prévue initialement par le gouvernement était le 18 mars mais les sénateurs PS ont demandé plus de temps de préparation. « Nous voulons disposer du temps raisonnable », a expliqué le président de la commission des Lois, Jean-Pierre Sueur (PS).
L’adoption du texte ne sera pas aussi aisée qu’à l’Assemblée nationale. La gauche ne dispose que de 6 voix de majorité et si toutes ses composantes, communistes compris, sont unies pour approuver le mariage gay, des défections individuelles sont attendues dans leurs rangs.
Au RDSE (à majorité radicaux de gauche), Jean-Pierre Chevènement, opposé au mariage pour tous, hésite entre ne pas prendre part au vote et l’abstention, et Gilbert Barbier, adhérent de l’UMP, votera contre. Le président du PRG, Jean-Michel Baylet, ayant fait de cette question, comme de celle du cannabis, un marqueur de sa campagne lors de la primaire pour la présidentielle, le reste du groupe devrait appuyer le gouvernement.
La grande inconnue reste la position des élus d’outre-mer, très réticents, y compris à gauche, pour des raisons culturelles ou religieuses. Certains pourraient choisir la politique de la chaise vide et ne pas venir voter.
Mais à droite, des « défections » sont également prévues. A l’UMP, Alain Millon et Christian Cointat ont annoncé qu’ils voteraient pour le texte, tandis que d’autres devraient s’abstenir comme Alain Fouché ou Christophe-André Frassat.
Chez les centristes de l’UDI-UC, Chantal Jouanno s’est prononcée pour le mariage gay et d’autres prévoient de s’abstenir, comme Muguette Dini, Valérie Létard, Nathalie Goulet ou Vincent Capo-Canella.
Les débats devraient être sans concession mais moins survoltés qu’à l’Assemblée nationale. « Nous ne serons pas dans la démesure », déclare-t-on au groupe UMP. « Nous avons préparé de nombreuses interventions et de nombreux amendements, plus de 200, nous ferons valoir nos convictions mais sans entraves ni excès », a déclaré le président du groupe, Jean-Claude Gaudin.
« Beaucoup de nos amendements iront dans le sens d’une union civile pour les homosexuels telle que suggérée par Nicolas Sarkozy », a-t-il ajouté.
« Je fais confiance à la sagesse des sénateurs et à l’ambiance plus apaisée qui règne au Sénat pour que le débat soit de haute tenue », a renchéri François Rebsamen. Le président des sénateurs PS est très optimiste quant à l’issue du vote. « On n’aura pas de soucis », a-t-il affirmé.
Certains PS plaident pour un vote conforme, c’est-à-dire sans modifications, ce qui rendrait le vote définitif et éviterait un retour vers l’Assemblée nationale. Le président du Sénat, Jean-Pierre Bel, a jugé « possible » un vote conforme.
Le rapporteur du texte, Jean-Pierre Michel (PS), un des pères du Pacs, a toutefois annoncé qu’il déposerait des amendements et n’a pas écarté que le gouvernement fasse de même.
« On est dans l’optique de garder le fond du texte, c’est-à-dire l’ouverture du mariage pour tous et l’adoption pour ces couples. Je pense que ces articles seront votés sans beaucoup de modifications, peut-être conformes », a-t-il expliqué.
« On est aussi dans l’optique de mieux examiner tous les articles de coordination, qui concernent l’état-civil, les parents, le livret de famille, sur lesquels il y a certainement à retravailler, ce qui est l’avis même du ministère de la Justice », a-t-il ajouté.