Mariage pour tous : Contre le mariage homo, une partie des anti choisit la radicalisation

Le front des opposants au mariage pour tous se fissure, les plus intransigeants d’entre eux ayant décidé de passer à des actions plus radicales quitte à « transgresser » la loi, ce que dénonce la gauche et les associations homosexuelles qui notent une montée de l’exaspération.

Des débats perturbés, des élus harcelés, les associations de défense des homosexuels prises pour cible: en quelques jours, la tension semble être montée d’un cran, alors que le sénat examine depuis jeudi le projet de loi ouvrant le mariage et l’adoption aux homosexuels.

Cette multiplication des actions coup de poings se fait en partie sous l’égide du Printemps français, mouvement qui se veut un écho aux révoltes du « printemps arabe » et qui a pris de l’ampleur après la manifestation nationale des opposants le 24 mars.

Sur le site du Printemps français, dont la porte-parole est Béatrice Bourges (photo), présidente du collectif pour l’enfance et ancienne organisatrice de La manif pour tous, les partisans affichaient clairement leur motivation: « Le gouvernement ne veut pas nous entendre, il va nous subir! »

« Pour nous, il y a un avant et un après 24 mars, les forces de l’ordre se sont retournées contre les familles, nous avons donc décidé d’entrer en résistance », dit à l’AFP Béatrice Bourges ajoutant que leurs actions étaient « non-violentes » mais dans la « transgression ».

« Nos militants sont ceux de La manif pour tous », affirme-t-elle, estimant que le mouvement est en train d’échapper à ses organisateurs.

De son côté, La manif pour tous a tenu à se désolidariser. « Nous n’avons rien à voir avec eux. Le printemps français et ses actions pourrissent notre action et lui portent un préjudice moral » en utilisant les logos, les affiches dit Frigide Barjot, l’une des porte-parole.

L’égérie des anti aux tenues roses bonbon reconnaît une « émulation » qui nécessite de « recadrer les troupes » mais ne s’estime « pas du tout débordée ». Toutefois, pour elle « le climat actuel et l’exaspération montante sont de la responsabilité du président et du gouvernement qui refusent d’entendre le peuple ».

Ras-le-bol général du côté LGBT

Dans ce contexte, le « ras-le-bol est général et l’exaspération des homosexuels atteint des sommets », déclare Nicolas Gougain, porte-parole de l’Inter-LGBT, qui déplore « la recrudescence d’actions de plus en plus radicales ».

« Même s’ils cherchent à se dédouaner, les organisateurs de La manif pour tous ainsi que certains dirigeants de l’UMP sont responsables de la libération de l’homophobie », affirme ce dernier. « C’est trop facile de se dédouaner maintenant après avoir soufflé sur les braises pendant des mois », ajoute-t-il.

Pour SOS Homophobie, « après la Semaine sainte, c’est la semaine des violences homophobes ». Relevant la « tournure dramatique » prise par les débats, l’association s’inquiète de « l’augmentation sans précédent du nombre de témoignages faisant état de propos ou d’agressions homophobes en 2012 et début 2013 ».

L’association évoque notamment l’agression de deux homosexuels dans la nuit de samedi à dimanche à Paris. Le visage tuméfié de l’un des deux, qui a fait le tour des réseaux sociaux en quelques heures, est pour les militants la preuve que le débat décomplexé conduit à de véritables drames.

Les associations dénoncent également la montée en puissance de l’extrême-droite dans ces mouvements. Ainsi, vendredi ce sont notamment des partisans des jeunesses nationalistes, qui ont empêché le rapporteur du projet de loi, Erwann Binet de tenir une conférence. Ce dernier a d’ailleurs décidé d’annuler toutes ses interventions.

Condamnant « des dégradations scandaleuses » commises ce week-end contre un local accueillant une manifestation de l’Inter-LGBT, le ministre de l’Intérieur Manuel Valls et la porte-parole du gouvernement Najat Vallaud-Belkacem ont déclaré : « la haine et les propos homophobes n’ont pas droit de cité dans notre pays et sont punis par la loi ».

Le Parti socialiste condamne « ces nouvelles dégradations inacceptables » qui « ne sont pas qu’un débordement isolé ». « Faute d’arguments valables, les opposants au mariage pour tous sont prêts aux pires outrances », dit le conseiller de Paris Ian Brossat (PCF).