Les autorités marocaines ont emprisonné deux hommes pour activités homosexuelles, dans la dernière en date d’une série d’affaires de ce type, souligne dans un communiqué du 28 juillet Human Rights Watch. Le parlement, qui s’apprête à examiner un projet de révision du code pénal, devrait retirer du projet les dispositions qui laissent intact le principe selon lequel des « actes entre personnes du même sexe » constituent un crime, passible de peines de prison pouvant aller jusqu’à trois ans.
Le 30 juin 2016, la Cour d’appel d’Agadir a confirmé le verdict de culpabilité des deux hommes, originaires de la ville de Guelmine, dans le sud du pays, que les gendarmes avaient affirmé avoir pris sur le fait le 20 mai dans une voiture garée dans une zone reculée.
« Si les législateurs veulent harmoniser les lois du Maroc avec sa Constitution de 2011, qui garantit le droit au respect de la vie privée, ils devraient décriminaliser les relations intimes entre adultes consentants », a déclaré Sarah Leah Whitson, directrice de la division Moyen-Orient et Afrique du Nord à Human Rights Watch.
Le Maroc a emprisonné des hommes à plusieurs reprises en vertu de l’article 489 du code pénal. Dans cette affaire, selon les attendus du Tribunal de première instance de Guelmine, un gendarme s’est approché d’une voiture stationnée dans une zone isolée, à l’écart de la route et à l’extérieur de la ville, et a surpris les deux hommes en plein rapport sexuel. Placés en garde à vue, ils auraient ainsi reconnu les faits devant la police. Lors de leur bref procès le 26 mai, l’un des deux hommes, J., âgé de 23 ans, a effectivement confirmé ses aveux tandis que l’autre, A., âgé de 46 ans, s’est rétracté, affirmant qu’il était innocent. Pour des raisons qui ne sont pas claires, ni l’un ni l’autre n’était assisté d’un avocat lors du procès.
Le tribunal a déclaré les deux hommes coupables, affirmant que la rétractation des aveux de A. n’était « qu’une manœuvre visant à échapper à ses responsabilités criminelles et à éviter une punition, démentie par le fait que ses aveux [à la police] était détaillés et que la preuve de leur caractère erroné n’a pas été apportée. » Le tribunal a condamné chacun des deux hommes à six mois de prison et à une amende de 500 dirhams (50 dollars) sur la base du seul chef d’accusation d’actes homosexuels.
La Cour d’appel d’Agadir a confirmé le verdict mais a réduit les peines à un mois et demi pour J. et trois mois pour A. Elle n’a pas donné d’explication pour cette différence entre les deux peines.
J. a récemment quitté la prison après avoir purgé sa peine. A. doit être libéré le 20 août de la prison d’Aït Melloul à Agadir. Mohamed Charef, le président de la Commission Régional des Droits de l’Homme d’Agadir, a rendu visite à A. en prison le 22 juillet, et a indiqué à Human Rights Watch que A. continuait de proclamer son innocence.
Le 9 juin, le Conseil de Gouvernement a approuvé et envoyé au Parlement un projet de révision du code pénal qui maintient les sanctions, lesquelles comprennent des peines de prison pour rapports intimes consensuels entre adultes dans les cas d’homosexualité (article 489), de rapports sexuels hors mariage (article 490) et d’adultère (article 491). Le projet de révision prévoit même un accroissement des amendes accompagnant les peines de prison qu’un juge peut imposer en vertu de l’article 489, jusqu’à un maximum de 20 000 Dirhams (2 000 dollars).
Au moins 20 organisations non gouvernementales au Maroc ont appelé à l’abrogation de l’article 489 du code pénal.
Criminaliser les rapports homosexuels entre adultes consentants constitue une violation des normes internationales en matière de droits humains. Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) interdit l’ingérence dans le droit au respect de la vie privée, que la constitution du Maroc protège dans son article 24. Le Comité des droits de l’homme des Nations Unies, composé d’experts internationaux qui interprètent le Pacte, a condamné les lois réprimant les actes homosexuels consensuels. Le Groupe de travail des Nations Unies sur la détention arbitraire a affirmé que les arrestations pour actes homosexuels consensuels constituaient, par définition, des violations des droits humains.
« Si le parlement marocain, en mettant à jour le code pénal, est censé l’harmoniser avec la Constitution de 2011 et avec les droits qu’elle garantit, alors il devrait décriminaliser les actes homosexuels », a affirmé Sarah Leah Whitson.