Deux jeunes gens soupçonnés d’être homosexuels ont été violemment agressés à Beni Mellal le 9 mars dernier, par des individus qui s’étaient illégalement introduits dans leur appartement. La scène filmée a été diffusée sur internet et relayée par de nombreux médias. Passée à tabac, visage en sang, l’une des victimes s’était d’abord rendue aux urgences, avant d’être interpellée par la police pour une « odeur d’alcool ».
Le jeune homme a finalement été jugé pour « actes sexuels contre-nature avec récidive et ivresse » et condamnée par le tribunal de première instance à quatre mois de prison ferme avec une amende. Tandis que deux de ses agresseurs, qui comparaissaient le même jour, écopent de deux mois avec sursis pour « possession d’arme blanche ».
Son « compagnon d’infortune », qui avait réussi à s’enfuir pendant l’attaque, a également été arrêté et présenté ce dimanche 27 mars au procureur du roi. « Mais la procédure a été renvoyée pour approfondissement de l’enquête » indique dans la presse locale, Lahoucin Harchi, responsable de l’Association Marocaine des Droits de l’Homme (AMDH) de Beni Mellal. Il précise que les assaillants ont confirmé leur présence au moment de l’agression, mais réfutent toutefois y avoir participé. L’un d’entre eux, qui aurait déjà eu des démêlés avec la justice, pourrait être poursuivi pour « intrusion dans le domicile d’autrui sans autorisation et agressions ».
L’audience est fixée au 4 avril prochain.
Plusieurs organisations de la société civile marocaine dénoncent une « agression sauvage » et appellent dans un communiqué conjoint à « la libération des deux victimes » et « la poursuite pénale des agresseurs ainsi que celui/celle qui a diffusé la vidéo révélant publiquement l’identité des jeunes ».
« Ces événements ne surviennent pas dans le cadre d’une affaire présentée à la justice mais il s’agit d’actes de violence sanctionnés par la loi » soulignent les signataires, qui rappellent que les ministères de l’intérieur et de la justice et des libertés ont « fait état de poursuite pénale à l’encontre de tout individu ou groupe qui se substitue à la justice et aux lois en agissant de leur gré pour sanctionner et ce conformément aux lois en vigueur ».
Ils s’insurgent du traitement réservé à ce dossier par les autorités qui « va à l’encontre des engagements du Maroc en termes de respect des droits humains tant sur le plan international que sur la base de la constitution de 2011 », qui stipule pourtant que « toute personne a droit à la protection de sa vie privée ».
Ce droit devrait ainsi conduire à l’abrogation de l’article 489 du code pénal qui criminalise les relations sexuelles consentantes entre personnes majeures de même sexe, afin de garantir et protéger les libertés individuelles et la vie privée des citoyennes et des citoyens.
Terrence Katchadourian
stophomophobie.org