Alors que plusieurs cas de répression pour « homosexualité » ont récemment marqué l’actualité marocaine, le collectif de défense des minorités sexuelles Aswat a publié ce 10 décembre une vidéo sur les réseaux pour donner les consignes à suivre en cas d’arrestation.
Sous forme de dessin animé, cette initiative inédite vise à prévenir les éventuels abus de pouvoir, en rappelant leurs droits aux personnes accusées de « déviance sexuelle » : un « crime » passible de peines pouvant aller jusqu’à trois ans de prison ferme selon le code pénal marocain.
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Aswat souligne par exemple que les autorités n’ont pas le droit de s’introduire dans le domicile d’autrui pendant la nuit ou encore d’exiger le code pin d’un téléphone portable.
« Il ne faut pas croire tout ce que disent les enquêteurs qui essayent de nous montrer qu’ils éprouvent de l’empathie pour nous », insiste le message dans la vidéo, avant de rappeler que tous les citoyens peuvent demander à consulter un médecin s’ils ont été maltraités.
Selon le collectif, les individus interpellés peuvent être fouillés illégalement et menacés par la police jusqu’à ce qu’ils admettent avoir eu des relations sexuelles avec une personne du même sexe.
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« Des personnes arrêtées signent un procès-verbal sans avoir le droit de le lire », ni d’ailleurs la possibilité de revenir ensuite sur leur déclaration. « Nous voulons avertir les gens pour qu’ils ne tombent pas dans le piège pendant leur garde à vue et ne soient pas condamnés », affirme le collectif dans le Monde Afrique.
Mais au Maroc, la répression de l’homosexualité ne vient pas seulement de la loi. Samedi 17 décembre, une vidéo d’un homme victime d’un acte de violence homophobe dans la région du Rif (nord) a fait le tour des réseaux sociaux. Filmé par un de ses agresseurs, le visage en sang, l’homme s’excuse devant la caméra pour son orientation sexuelle.
Ces dernières années, plusieurs lynchages homophobes ont été médiatisés.
En juin 2015, un homme avait été passé à tabac par une foule de gens, dans une rue à Fès. La scène avait été filmée et postée sur les réseaux sociaux. Une autre vidéo datant de mars 2016 montrait l’agression violente de deux hommes par un groupe de personnes dans un appartement de Beni Mellal (centre).
« Ce sont des procès populaires », explique une militante du collectif, qui a souhaité garder l’anonymat pour des raisons de sécurité. « Les agresseurs considèrent qu’il s’agit d’un crime héroïque car ils tirent leur légitimité de la loi ».
Au-delà des autorités, les homosexuels au Maroc font face à un fort conservatisme social. « Il n’y a qu’à voir toutes les insultes homophobes que les internautes ont commentées sur la vidéo de sensibilisation », regrette le collectif. « Nous avons eu tellement de signalements que Facebook a menacé de fermer notre page ».
Une première association de défense des droits des minorités persécutées, notamment en raison de leur orientation sexuelle, aurait par ailleurs tenu ce samedi 24 décembre une Assemblée générale constitutive au siège de l’instance marocaine des droits de l’Homme, à Rabat. Vingt-quatre membres ont été élus, dont quinze dans le Conseil administratif et neuf au niveau du Bureau exécutif, selon le journal Akhbar Al Yaoum, qui a interviewé le fondateur du collectif, Tarik Naji. Un dossier juridique serait en cours d’élaboration.