Catholique pratiquant, j’ai hésité à intituler ma lettre par : « Lettre d’un catholique à une catholique ». Cela me paraissait tellement surréaliste car bien que nous sommes baptisés dans la même Eglise, il semble évident que nous ne fréquentons pas les même chapelles. Nos convictions, notre lecture de l’Evangile et notre rapport à Dieu sont diamétralement opposés. Et tout cela me donne à penser qu’en réalité, nous ne sommes certainement pas de la même religion. Ma foi se nourrit dans l’amour des autres, dans le respect de la diversité et dans la Vérité. Je ne me mobilise pas contre les droits de mes semblables. J’essaie surtout de tourner sept fois (ou plus) ma langue dans ma bouche (ou dans celle de mon tendre époux) avant de dire, d’exprimer des propos qui risqueraient d’heurter et de blesser mon prochain.
En tant que catholique, je crois en un Dieu qui est Amour, qui a les visages des hommes et des femmes de ce monde. Je crois à la beauté de la diversité et surtout à son importance. Par amour pour Dieu et surtout par amour pour l’humanité, je me fiche de la couleur de peau, du handicap, de l’orientation sexuelle, du sexe, du genre, du handicap ou de l’âge de mes frères et sœurs. Je me nourris de leurs différences pour grandir spirituellement et m’approcher davantage du Christ.
Je crois surtout en cette République et à ses valeurs. La laïcité me permet de vivre ma foi comme je le veux et de vivre avec des tas de gens aux religions, aux philosophies différentes de la mienne. La laïcité nous garantit la diversité et l’enrichissement de notre société.
En tant que Républicain, je suis heureux de voir des femmes travailler, voter et être maîtresse de leur propre corps même si je regrette que dans de nombreux cas, il existe encore trop d’inégalités.
En tant que citoyen, je suis comblé que mon mariage et ma famille soient reconnus par l’Etat.
Ces libertés et toutes les autres nous permettent de nous épanouir et de nous éloigner de la souffrance. N’est-ce pas une des volontés de Dieu ?
Et pourtant, tout cela semble vous déranger…Vous affirmez défendre la Vie mais au nom de quoi, au nom de qui ? Vous passez votre temps à vous immiscer dans la vie privée des autres, à juger au nom de la Ste Bible, au nom des racines chrétiennes de la France et de l’Europe.
En fait, vous et vos amis(es), vous souhaitez simplement une société à votre image : triste, aigrie, uniforme…Il n’y a pas de couleurs et d’amour dans vos idées. Tout cela me fait dire que vous idolâtrez un autre dieu, un être misérable nourri par votre haine collective. En fait, c’est plutôt vous qui évoluez dans l’abomination…
Nous avons seulement deux points communs :
-Nous aimons le naturisme et le sexe. Alors, continuez à faire exploser le vestibule, expérimentez de nouveaux scénarios coquins, hurlez de plaisir sans limite et surtout fichez nous la paix. Parfois et même souvent, il vaut mieux avoir quelque chose d’assez conséquent en bouche, plutôt que de dire des absurdités.
– Tous les deux, nous sommes pêcheurs. Vous, à cause de vos réflexions absurdes et blessantes et moi parce que je n’aime pas les réacs, les populistes ou les intégristes. A chaque récitation du « Notre Père », il m’est toujours aussi pénible de dire cette phrase avec conviction et sincérité : « Pardonne nous nos offenses comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés ». Cette phrase est la plus belle et en même temps la plus terrible à dire. Il faut en avoir dans le pantalon et dans le soutif’ pour arriver à aller au-delà de ses blessures pour aimer quelqu’un qui véhicule la haine et la bêtise humaine.
A quelques semaines de la Semaine Sainte, essayez de réfléchir (j’imagine que cela ne doit pas être évident pour vous) à l’impact, aux chocs de vos propos, de vos phrases tristement « légendaires » auprès de jeunes garçons, de jeunes filles qui se posent des questions sur leur identité ou leur orientation sexuelle. Essayez d’imaginer, un seul instant, la souffrance qu’ils(elles) peuvent ressentir lorsqu’ils(elles) vous voient manifester aux côtés d’autres réacs contre leur Amour et leur Existence. Vous qui défendez corps et âme l’intérêt de l’enfant, pensez à ces jeunes, soyez une vraie chrétienne !
Malgré une dizaine de tentatives de suicide durant mon adolescence, j’ai réussi à survivre à l’homophobie, surtout à celle qui était véhiculée dans mon Eglise. Et je crois que nous survivrons toutes et tous à vos haines, à vos bêtises et à votre obscurantisme car Dieu n’est pas du côté des bigots ou des Dames Patronnesse. Il est du côté de celles et ceux qui souffrent du rejet des autres…
Pour terminer, sachez, Chère Madame Boutin, qu’être une abomination à vos yeux est un honneur et même un soulagement.
Patrick Tomas
Paris, le 2 avril 2014
http://unbelgeaparis.wordpress.com/2014/04/02/message-personnel-lettre-ouverte-a-christine-boutinde-la-part-dune-abominable-personne/