Gauthier Pizzi, qui pensait pouvoir sereinement fêter ses 30 ans avec une amie dans un bar du vieux Nancy, le 17 juin dernier, a été injurié et violenté par une dizaine de supporters homophobes et racistes de l’AS Nancy Lorraine, le club de football local. Il témoigne.
Gauthier P. : « Ça c’est passé vers 23h, en plein centre de Nancy, à proximité de la place Stanislas, dans la Grande-Rue. J’ai été pris à partie verbalement, avant d’être agressé et blessé par deux d’entre-eux. Le groupe s’était rassemblé au bar IPN, avec une centaine d’autres personnes, quand les insultes ont commencé à fuser : ‘macaque, babouin, Mamadou, bamboula’.
C’est d’ailleurs ce qui m’a interloqué et m’a amené à me retourner, car je suis natif de Nancy, très actif dans la vie locale que ce soit au niveau caritatif, pro et festif. Donc ici tout le monde me connait et je n’ai pas pour habitude de me faire insulter, ni alpaguer ainsi dans le Vieux-Nancy qui est un endroit où il fait bon vivre.
Mais, après les injures, un premier individu m’a flanqué un coup de tête, puis l’autre un coup de poing à l’arcade sourcilière. Et ce sont les patrons et le videur du bar d’en face, le UTY, où j’étais donc initialement, avant de traverser la rue pour récupérer mes cigarettes dans la voiture et me faire agresser, qui m’ont extirpé et abrité. Avec les autres clients, nous sommes restés ainsi barricadés en attendant désespérément l’arrivée des forces de l’ordre. Et lorsque les pompiers m’ont escorté jusqu’à leur camion, cette centaine de fans de l’ASNL m’ont carrément fait une ‘haie d’honneur’ en scandant des propos homophobes. ».
Stop Homophobie : « Est-ce que cette agression aurait pu être évitée? »
Gauthier P. : « La tension était palpable depuis le début de l’après-midi. Les commerçants de la grand rue avaient déjà fait plusieurs signalements dans la journée après des incidents rencontrés avec ce groupe de personnes. Les débordements étaient donc prévisibles. Des effectifs de policiers en renfort auraient pu davantage assurer la sécurité du quartier, très fréquenté. Je suis d’ailleurs resté 45 minutes dans le camion des pompiers avant que la police n’intervienne, sans procéder à aucune arrestation cependant. Mes agresseurs étaient pourtant toujours présents.
La vidéo-surveillance n’a pas non plus été immédiatement exploitée, alors que les faits se sont déroulés en plein centre-ville, avec de nombreux témoins oculaires présents, un samedi soir ».
Stop Homophobie : « Comment s’est passé votre dépôt de plainte ? »
Gauthier P. : « Heureusement, mon agression a beaucoup indigné et le maire de la ville, Mathieu Klein, a rapidement réagi. La dimension raciste a été prise en compte. Mais le caractère homophobe a quelque peu été mis en doute par le policier.
Stop Homophobie : « Qu’en est-il aujourd’hui? »
Gauthier P. : « La médiatisation de mon agression a alerté SOS Racisme qui m’a contacté et mis en relation avec Stop Homophobie. Autrement, je n’aurais pas eu le réflexe de me rapprocher de ces associations nationales.
J’espère également que mon agression servira à ce que ce type de fait ne se reproduise plus, et à Nancy déjà, car nous sommes une grande ville qui accueille chaque année énormément d’étudiants étrangers. Moi-même, je ne pensais jamais subir pareille avanie dans ma ville.
Enfin, je souhaite que mes agresseurs soient punis avec fermeté et sévérité. Car, j’en croise encore parmi ceux qui m’ont insulté et certains, à leur expression, paraissent ne comprendre ce que je fais là en centre-ville. De toute façon, quand on parle de racisme et d’homophobie, on trouvera toujours des gens pour rétorquer qu’on en fait trop, et c’est dommage. ».