Une association russe alliant la promotion du sport et la défense de la cause LGBT veut organiser des « jeux gays à Moscou après les JO-2014 en Russie. Un défi dans un pays où l’homophobie est monnaie courante.
La Fédération sportive LGBT, qui organise des compétitions comme n’importe quelle autre institution, a désormais un objectif très ambitieux: organiser les premiers « jeux gays » dans la capitale quelques jours seulement après les JO de Sotchi (7-23 février 2014), dans l’espoir d’attirer des stars internationales du sport pour soutenir leur cause.
« C’est un projet de très grande envergure que nous n’avons jamais organisé jusqu’ici », déclare la coprésidente de la Fédération LGBT, Elvina Iouvakaïeva.
Ces jeux se tiendraient pendant cinq jours, du 26 février au 2 mars 2014, après les JO de Sotchi mais avant les jeux Paralympiques, du 7 au 16 mars.
« C’est un signe (…). Nous espérons attirer l’attention de sportifs et ceux qui couvrent les jeux de Sotchi », ajouté Elvina Iouvakaïeva.
Mais l’événement pourrait entraîner des attaques homophobes ou tout simplement être interdit dans un pays où l’homophobie est largement répandue. L’homosexualité y était considérée comme un crime jusqu’en 1993 et comme une maladie mentale jusqu’en 1999.
Le président Vladimir Poutine a promulgué en juin une loi punissant d’amende et de prison la « propagande » homosexuelle devant mineurs, un texte jugé imprécis et discriminatoire par nombre de défenseurs de droits de l’homme. Cette loi a aussi provoqué de vives critiques en Occident, auxquelles se sont jointes des célébrités telles les chanteuses de pop américaines Madonna et Lady Gaga.
Mais les organisateurs des « jeux gays », dont les disciplines comprendront notamment le tennis, la natation et le ski de fond, estiment qu’un tel événement ne tombe pas sous le coup du texte. « Nous n’invitons pas de mineurs à nos événements », souligne Elvina Iouvakaïeva. Contrairement aux manifestations sur la voie publique, la Fédération LGBT n’est pas tenue d’obtenir l’autorisation des autorités pour organiser ces jeux.
« Je suis sûr que nous n’aurons aucun problème », estime même le cofondateur de l’association, Konstantin Iablotski, un amateur de patinage artistique ouvertement gay, professeur de chimie dans une école de Moscou.
Les premiers « jeux gays » ont été organisés en 1982 à San Francisco, aux Etats-Unis. A Moscou, les organisateurs cherchent actuellement à recruter des stars internationales pour donner de l’ampleur à la compétition. L’ancien plongeur américain médaillé d’or Greg Louganis, ouvertement homosexuel, a déjà promis de venir: « Il m’a dit personnellement qu’il nous soutiendrait », a indiqué Konstantin Iablotski. Ce dernier a aussi invité le mari du patineur américain Johnny Weir, Victor Voronov, qui a des origines russes.
Combattre la stigmatisation
Les organisateurs nourrissent en revanche peu d’espoir de la part des célébrités russes. Une sportive russe gay qui a soutenu précédemment la Fédération LGBT a ainsi été priée par ses parraineurs de ne pas s’exprimer publiquement sur la cause gay avant les JO de Sotchi, a indiqué Elvina Iouvakaïeva sans la nommer. Et en août, la perchiste russe Yelena Isinbayeva avait suscité une vive polémique en prenant la défense de la loi interdisant la « propagande » homosexuelle devant mineurs. «
La propagande des relations non traditionnelles serait un grand signe de non-respect des citoyens de notre pays et de nos lois », avait-elle déclaré, dans un anglais approximatif. Avant de revenir sur ses propos. La Fédération LGBT russe a été fondée par Konstantin Iablotski et Viktor Romanov, un enquêteur à la retraite qui s’occupait de la lutte contre le crime organisé dans les années 1990, après leur rencontre en 2010 aux « jeux gays » de Cologne, en Allemagne.
L’association sollicite régulièrement le ministère des Sports pour obtenir des subventions. Elles sont systématiquement rejetées. « Nous voulons dialoguer avec les autorités, les ONG et le public », souligne Elvina Iouvakaïeva. « Nous voulons faire un effort pour arriver à ce que notre communauté ne soit plus stigmatisée ».
(Source AFP)