Au moins 110 membres des minorités sexuelles LGBT ont été assassinés en 2015 en Colombie, dont 43 en raison précisément de leur orientation sexuelle, selon un rapport publié jeudi par plusieurs ONG à Bogota : « le chiffre le plus élevé depuis 2011 ! »
Au total, 52 hommes ont été tués, onze lesbiennes, sept bisexuels ainsi que 33 personnes trans. Aucune information précise n’étant disponible sur les sept autres meurtres.
Par ailleurs, 91 cas de violences policières ont également été recensés en 2015 à l’encontre des LGBT, dont 22 avec encore pour mobile « l’orientation sexuelle » des victimes.
Les ONG ont déploré que dans « plus de la moitié » de ces affaires, les enquêtes aient « été classées ».
Et puis, le 2 octobre dernier, le pays rejetait par référendum un accord de paix historique avec les rebelles des Forces Armées Révolutionnaires (FARC, extrême gauche), en raison notamment de « l’idéologie du genre ». Le terme aurait en effet envahi la campagne et l’imaginaire des croyants, catholiques ou évangéliques, rapporte Le-Monde.
L’accord, négocié pendant quatre ans, a été rédigé en langage inclusif : il parle « des guérilleros et des guérilleras », « des paysans et des paysannes », de « tous et toutes », prévoyant ainsi des mesures spécifiques pour les femmes, et l’évocation des droits des LGBTI. Le 24 juillet, la communauté internationale a d’ailleurs célébré « le premier accord de paix au monde qui prend en compte la perspective de genre ».
Mais, la publication parallèlement de fascicules à Bogota contre la discrimination dans les collèges a suscité une mobilisation sans précédent des défenseurs de la « famille traditionnelle », suscitant en août des manifestations dans toutes les grandes villes. Pourtant, deux mois plus tôt, le mariage entre personnes du même sexe avait été légalisé dans une relative indifférence par une décision de la Cour constitutionnelle.
Les fascicules, intitulés « Milieux scolaires sans discrimination », avaient été élaborés sous l’égide des Nations unies et du ministère de l’éducation. Mais de faux extraits, tirés d’une bande dessinée pornographique belge, ont enflammé les réseaux sociaux. Et un questionnaire adressé aux directeurs d’établissements pour détecter d’éventuelles pratiques discriminatoires a fini d’attiser le scandale. L’Eglise catholique et ses rivales évangéliques se sont insurgées à l’unisson contre « l’idéologie du genre ». Et en campagne pour le non, l’ancien président Alvaro Uribe a fait le lien entre les deux événements, affirmant que « l’idéologie du genre incluse dans les accords de paix entrera, sans vrai débat, dans notre ordonnancement constitutionnel ». Les évangéliques ont ressassé l’argument et le non a gagné.
Joëlle Berthout
stophomophobie.org
avec source : Le-Monde