La loi n’explicite pas le terme de « propagande », mais elle indique clairement qu’il faudrait interdire la propagande de l’homosexualité « comme une norme de comportement ». Ceci veut dire qu’en pratique, la loi risque de provoquer des violations régulières de la liberté d’expression, de l’interdiction de discrimination et d’autres droits humains.
Le plus inquiétant est que la loi rend les homosexuels, notamment les activistes de la communauté LGBT, extrêmement vulnérables. Les activistes qui organisent des actions contre ces projets de loi, dont la mobilisation pour « le jour des baisers » devant la Douma [Assemblée fédérale russe] à Moscou, font régulièrement l’objet de violences de la part des radicaux orthodoxes et de l’extrême-droite. La police reste relativement passive.
Une loi homophobe en phase avec l’opinion
Les sondages d’opinion organisés par le centre sociologique Levada en juillet 2010 montrent que la population russe reste extrêmement homophobe. 38% des sondés considèrent l’homosexualité comme une perversion ou une mauvaise habitude; 36% comme une maladie ou un résultat d’un traumatisme psychique; et seulement 15% comme une orientation sexuelle qui a le même droit d’exister que l’hétérosexualité.
Seulement 25% des sondés pensent qu’il faut laisser les homosexuels en paix, alors que 24% croient qu’il faut leur apporter de l’aide psychologique, les soigner, pour 21%, les isoler de la société, pour 18%, et même les liquider, pour 4%. 41% croient qu’il faut limiter les droits des homosexuels. 41% considéreraient normal de pouvoir à nouveau procéder à des discriminations sur la base de l’orientation sexuelle des personnes. Le taux d’attitudes homophobes ne cesse d’augmenter, si l’on se rapporte aux sondages en 1998 et 2005.
Le projet de loi reflète parfaitement les attentes de la majorité de la population. Ainsi, la version du pouvoir « démocrate » à la russe consiste à soutenir la majorité (sans être d’ailleurs élu
légalement par cette majorité), tout en reprimant les libertés basiques de la minorité. Ce que, en XXI siècle, on peut facilement appeler une perversion de la démocratie.