« Sale p***, je vais te buter » : un guet-apens homophobe en Martinique, mais un verdict qui l’ignore

Lonny Féréol, un délinquant multirécidiviste de 28 ans, a été condamné lundi 24 mars à 13 ans de réclusion criminelle par la cour d’assises de Fort-de-France pour complicité de vol à main armée. Pourtant, malgré des faits accablants, le jury n’a pas retenu la circonstance aggravante d’homophobie.

« Sale pédé, je vais te buter ! »

L’affaire remonte à octobre 2020. Brice Armien-Boudré, co-président de l’association Kap Caraïbe, principale organisation LGBT+ de l’île, a été attaqué à Ducos par deux individus. L’agresseur principal, Mike Beuze, aujourd’hui décédé dans un accident de la circulation, l’avait frappé violemment avec le canon de son arme en le traitant de « sale pédé », lui causant la perte totale de son œil gauche.

Le ministère public avait requis 20 ans de réclusion contre Lonny Féréol, son complice, mais le verdict est bien en deçà de cette demande. Aussi, l’association Kap Caraïbe et son avocate, Maître Vaïté Corin, ont exprimé leur « profonde déception » face à l’absence de reconnaissance du caractère homophobe de l’attaque, rapporte le journal France-Antilles, dans son édition de la Martinique.

Un jury populaire martiniquais homophobe

Les propos de Féréol durant le procès avaient pourtant de quoi interpeller : « À sa façon de parler, j’ai vu que ce n’était pas quelqu’un comme nous », a-t-il déclaré, tout en reconnaissant que son comparse avait ciblé une victime « facile, qui ne se défende pas », indique nos confrères de Radio Caraïbes Internationale.

Puis feignant d’ignorer l’orientation sexuelle de Brice Armien-Boudré, qui est une personnalité notoirement connue en Martinique pour son engagement dans la lutte contre l’homophobie, il poursuit : « Si j’avais su plus tôt qu’il était gay, je ne serais jamais devenu ami avec lui ». Prouvant au passage son homophobie.

Malgré cela, pour le jury populaire martiniquais, il n’y a pas d’homophobie, au risque de ne pas rendre totalement justice envers la victime et ses proches.

Une situation qui fait écho à des cas d’agressions similaires survenues en France hexagonale, où lors de l’instruction des dossiers, ce sont les juges qui ne reconnaissent pas la circonstance aggravante du racisme, même quand les faits sont étayés, comme l’a démontré la récente enquête de nos confrères du média Loopsider.

Un déni de justice pour les victimes d’homophobie en Outre-mer

Enfin, ce verdict rappelle d’autres affaires en Outre-mer où la justice n’a pas retenu la circonstance aggravante d’homophobie, malgré des éléments accablants. En Guyane en 2021, une agression à l’arme blanche avait été jugée sans cette qualification. En Guadeloupe, en 2019, un homme ayant porté 33 coups de couteau à une victime en raison de son orientation sexuelle n’avait été condamné qu’à 7 ans de prison en correctionnel.

Une peccadille au regard des traumatismes psychologiques de la victime.