Le nouveau ministre de la Justice, Me Sidiki Kaba est pour la dépénalisation de l’homosexualité au Sénégal. Il l’avait fait comprendre au site Internet de la chaîne de télévision française, France 24, dans un entretien en date du 08 janvier 2009, que Leral vous propose. C’était au lendemain de la condamnation de huit homosexuels à huit ans de prison.
Président honoraire de la Fédération internationale des droits de l’Homme, Sidiki Kaba estime que la condamnation d’homosexuels sénégalais à huit ans de prison est contraire aux conventions internationales signées par Dakar.
FRANCE 24 – Le tribunal de Dakar a condamné neuf jeunes Sénégalais à huit ans de prison pour homosexualité. En tant que président honoraire de la Fédération internationale des Ligues des droits de l’Homme (FIDH), quel regard portez-vous sur ce verdit ?
Sidiki Kaba – Cette décision est grave et extrêmement sévère. Elle montre qu’il existe une vive répression de l’homosexualité au Sénégal. La sévérité du jugement est d’autant plus surprenante que le procureur avait requis cinq années d’emprisonnement. Ce qui, en soi, constitue déjà une lourde condamnation. En prononçant une telle sanction, le tribunal a voulu frapper pour l’exemple et faire peur aux autres.
Au Sénégal, il existe une forme de pression sociale qui pousse la justice à sévir fortement. Elle est notamment le fait des islamistes et d’une partie de l’opinion publique hostile aux personnes ayant des orientations sexuelles différentes.
FRANCE 24 – Le Sénégal se targue d’être le pays le plus démocratique de la région. N’estimez-vous pas que cela est contradictoire avec le verdict prononcé aujourd’hui par la justice ?
Sidiki Kaba – Il y a une contradiction entre l’image démocratique et d’Etat de droit que le Sénégal cherche à projeter dans le monde et la réalité du terrain. S’il veut être crédible et en conformité avec les conventions internationales des droits de l’Homme qu’il a lui-même signées et ratifiées, le gouvernement doit changer d’urgence la nouvelle loi qui condamne les homosexuels.
Il faut savoir qu’au Sénégal, l’article 319 du code pénal ne mentionne pas directement l’homosexualité mais parle plutôt d’ »actes contre nature ». Autrement dit, d’actes entre deux personnes du même sexe et de zoophilie. En réalité, c’est une qualification « fourre-tout » qui permet à la justice de condamner les homosexuels plus facilement.
FRANCE 24 – Que font les organisations de défense des droits de l’Homme pour éviter que les homosexuels ne fassent l’objet d’un acharnement judicaire et social au Sénégal ?
Sidiki Kaba – Les Sénégalais ne découvrent pas l’homosexualité. Elle existe depuis longtemps. D’ailleurs, on qualifie cette catégorie de personnes de « gor djiguen », ce qui signifie « homme-femme ».
Les Ligues des droits de l’Homme sont plus que jamais interpellées. Elles doivent être le fer de lance de la reconnaissance des droits des homosexuels qui vivent des moments durs. Certaines personnes sont même contraintes de quitter le Sénégal pour échapper à la loi et à la vindicte populaire.
Les députés doivent également se saisir de cette question au nom de la liberté sexuelle. Quant à l’État, qui se targue de défendre la démocratie et les droits de l’Homme, il vaudrait mieux qu’il s’engage sur le chemin de la dépénalisation de l’homosexualité.
Du coté des homophobes :
Me El Hadj Diouf, avocat parlementaire qui n’est pas satisfait du nouveau gouvernement s’est prononcé sur la nomination de Me Sidiki Kaba comme ministre de la Justice qui avait plaidé la dépénalisation de l’homosexualité. L’avocat de déclarer que « notre peuple ne l’acceptera jamais, le Sénégal n’acceptera jamais la légalisation de l’homosexualité ça c’est clair. Même s’il est nommé ministre il a déjà échoué ». Me Diouf qui se désole de la mise sur pied du nouveau gouvernement lance un appel à Macky Sall. « Ce qui est inacceptable c’est de prendre la direction du ministère de la justice au moment où le Sénégal traque les biens mal acquis et au moment où son client bénéficie de la liberté provisoire. Donc il est lui-même juge et partie. Dans l’affaire Habré il fait partie des avocats des victimes entre guillemets d’Habré et tout le monde sait que c’est le ministère de la justice qui pilote tous ces dossiers. Ce gouvernement là n’ira nulle part, le premier ministre n’a aucune compétence et j’ai peur pour mon pays. C’est du pure amateurisme », a-t-il pesté sur les ondes de la RFM. Toutefois, « mon ami Macky Sall doit se ressaisir et nommer l’homme ou la femme qu’il faut à la place qu’il faut», propose-t-il.
Face à un nouveau ministre de la Justice qui milite pour la dépénalisation de l’homosexualité, l’ONG Djamra n’a pas manqué de réagir. Son porte-parole du jour, Mame Matar Guèye rappelle: « Macky Sall avait donné sa position sur ce débat. Il ajoute que : « il avait fait cette déclaration en 2009 au lendemain du scandaleux mariage homosexuel de Mbao à l’occasion duquel neuf homosexuels ont été interpellés par la police au terme de l’article 319 du code pénal sénégalais qui condamne les unions contre nature. Me Sidiki Kaba actuel ministre de la justice était à l’époque président d’une organisation des droit de l’homme dont la position est bien connu en la matière, mais aujourd’hui le contexte a totalement changé Me Sidiki Kaba est aujourd’hui membre du gouvernement, de surcroit ministre de la république et travaillant sous les ordres de Macky Sall. Celui qui le jeudi 11 Avril 2013 a choisi un lieu aussi officiel que le palais de la république, aussi solennel que le conseil des ministres la société sénégalaise forte de son ancrage dans ses valeurs culturelles et religieuses ne peut s’accommoder d’une dépénalisation de l’homosexualité. Et ce dernier avait ensuite courageusement récidivé en Juin 2013 à l’ occasion de la visite officiel du chef de la plus grande puissance diplomatique, économique et militaire du monde, et devant toute les chaines de télévision du monde, en regardant le président Obama dans les yeux pour lui dire que tant que lui Macky Sall sera au pouvoir le Sénégal ne dépénalisera jamais l’homosexualité sous son magistère. C’est donc cette position qui nous importe tout le reste n’est que des agitations stériles »,
Avec FRANCE 24 et pressafrik.com