En fait, tout a commencé un soir de septembre, il y a deux ans. Il était là à cette soirée. Il me regardait et me souriait. Tout d’un coup tout s’est bousculé. Jamais je n’oserais ! Et puis merde, si ! Pourquoi pas ? Et puis ce qui devait arriver arriva. On est parti chez moi. Il était doux. C’était la première fois. C’était bien, vraiment très bien.
Par peur, je lui ai dit de ne jamais revenir. Et de surtout n’en parler à personne. Parce que non je ne le suis pas ! C’était la première fois que je la sentais, la boule au ventre. « Avec qui es-tu parti? Qu’avez-vous fait ? Où êtes–vous allés ? C’est un bon coup ? On la connait ? » Mes amis m’amusaient. « Non, je ne vous dirai pas comment elle s’appelle ! »
Je ne vous le dirai jamais. Ils se font de plus en plus insistants : « Tu ne serais pas…? »
Oui je le suis mais je ne vous le dirai jamais. Enfin ça c’est ce que je croyais. Puis est venu le temps des questions. Pourquoi je ne l’assume pas ? Pourquoi il y a deux mois, dans cette gare je n’ai pas acheté ce putain de magazine ? Et il y a cette boule au ventre. Elle est réapparue il y a deux mois. Depuis, elle ne me quitte pas. Je le suis, et alors ?
Oui c’est sûr, je le suis. Mais une fois que ça c’est dit, maintenant je fais quoi ? Si je leur dis, à mes amis, comment vont-ils réagir ? Leur regard va-t-il changer ? M’inviteront-ils toujours aux soirées ? Est-ce que sur mon front il y aura toujours écrit mon prénom ou juste deux lettres : PD ? Et ma famille dans tout ça ? Jamais ils n’accepteront. Enfin je crois.
Tout se chamboule. Je dois faire avec, l’accepter, le vivre. Mais je ne suis pas prêt. Enfin je pense. Pourtant je voudrais le crier ! Moi, ce que je voudrais, c’est de ne plus avoir à me poser toutes ces questions qui me torturent, ne pas avoir à me demander si je suis normal ou non ! Parce que, oui, je suis normal, je suis le même qu’avant, j’ai 22 ans et je suis pédé, c’est tout.
Pierre, étudiant, 22 ans, Poitiers