Cinq heures du mat’ à la sortie d’une boîte gay. Raphaël, 26 ans, et son copain sont interpellés par trois individus qui marchent derrière (eux) : « Eh les pédés, vous avez une clope? » Puis les coups…
« Un des types a attrapé mon copain par le cou. Je me suis avancé pour le défendre. J’ai senti un énorme coup derrière la tête. J’ai perdu connaissance. Je me suis réveillé par terre, la tête en sang et dans un étau. J’avais la marque des chaussures sur le visage, je saignais du nez, de la lèvre… Mon compagnon m’a raconté qu’ils avaient continué à me tabasser pendant que j’étais évanoui. Des coups dans la tête. Coups de pied, poing… Mon copain avait reçu des coups dans la mâchoire. Nos agresseurs étaient partis, sans rien nous voler, pourtant on avait des portables, de l’argent… Ils nous ont juste tabassés. »
C’était en avril 2013, deux jours avant le vote de la loi sur le Mariage pour tous. La France était borderline, toutes haines dehors. Trois ans plus tard, les auteurs n’ont pas été retrouvés, mais « j’ai eu des centaines de messages de soutien », confie Raphaël, qui revient cette semaine dans NiceMatin sur son agression. Il a également reçu énormément de messages hostiles : « Tu aurais dû crever, pédé, tu as tout fait pour passer à la télé etc. Au bout d’un moment, j’ai arrêté de les lire… »
« L’homophobie ce n’est pas que les coups. Souvent, on ne la voit pas, elle ne laisse pas de traces sur le corps. Pourtant, elle fait mal… Pour moi, ça a commencé à l’école primaire. J’avais 10 ans, je faisais de la danse, les gamins de ma classe me traitaient de pédé. Je ne savais pas encore vraiment que j’étais homo. « Danseur, pédé… » L’étiquette. Tous les jours. Tout le temps. C’est violent. Tu es complexé, tu as honte. Je n’en ai jamais parlé à personne. Je ne voulais pas arrêter la danse, c’était la seule chose qui me donnait du bonheur… »
L’homophobie ordinaire, c’est aussi plus tard, « en soirée, ces clichés qui reviennent sans cesse : Tu fais pas « gay » ou je t’aime bien pour un « gay »… C’est insupportable. »
Raphaël oscille entre résilience et réminiscence : « Depuis, j’affirme plus encore qui je suis. Ça m’a donné plus de force. Même si je reste très méfiant dans la rue le soir : je me retourne tout le temps… Aujourd’hui, en 2016, je sais que je ne peux pas tenir la main de mon copain dans la rue sans insulte ou regard déplacé… »