Transphobie, homophobie… nous subissons toutes et tous les mêmes affronts et faire ce qu’on peut pour mieux se connaître c’est aussi un pas vers l’égalité :
« Je suis née dans un corps de garçon sauf que la nature s’est plantée : elle m’a donnée un esprit et cœur de femme »
Déjà petite, je me comportais comme toutes les petites filles sauf que mes parents me l’interdisaient, ça venait naturellement chez moi et, à chaque fois, refoulée par la famille l’entourage et l’école. Ce qui fait que, vu ma différence, les enfants sentaient bien je n’avais pas de place ni chez les garçons ni chez les filles. Ils se moquaient bien de moi. Cette société en général d’ailleurs, autant-dire. Les enfants et ados sont cruels, vous savez. Mon adolescence, quand mon corps a changé, ça été un enfer, je m’acceptais très mal j’étais très timide.
Les années ont passé, je me suis refoulée encore et encore pour être un mâle comme la société le veut. Avec le temps, je me suis sentie de plus en plus mal dans ma peau .Toutes ces années, j’ai perdu ma capacité de confiance en moi, d’assurance de défense, d’amour pour moi. Arrivée à l’âge adulte, toujours célibataire malgré 1 ou 2 histoires d’amour sans importance. Je me suis enfoncée dans la drogue, l’alcool. Presque toutes les drogues, sauf héroïne et cocaïne. Je m’enfonçais dans l’angoisse, la dépression, l’insécurité. Je me suis révoltée et dirigée vers des personnes qui m’acceptaient comme j’étais, les punks.
J’ai pu être plus féminine sans être jugée mais au contraire, défendue ce que j’avais besoin. J’ai connue quelques garçons qui, sans doute, me permettaient d’être femme inconsciemment mais ça ne s’arrêtait qu’au sexe qui, quand on est, dans un corps qui n’est pas le bon, une torture.
Puis un jour, j’ai vraiment réalisé que j’étais femme. J’étais perdue.
J’avais un couple d’amis avec qui je me sentais un peu comme leur enfant. En sécurité. Un jour, j’ai décidé d’en parler à la jeune fille de ce couple, (des larmes montent en racontant ça). J’ai essayé de lui parler, j’étais bloquée, elle a parlé pour moi, en fait elle m’a dit, tu es une femme j’ai plus fait que l’écouter qu’autre chose en acquiesçant. J’étais bouleversée heureuse d’avoir quelqu’un qui m’avait entièrement comprise et qui m’aidait à le vivre au grand jour. Elle m’a dit: c’est le carnaval, on va en profiter pour te réaliser. Elle m’a habillée, maquillée. Je buvais pour essayer d’oser franchir ce pas, vaincre toutes ces barrières qu’on m’avait mises. J’ai vécu un superbe carnaval, heureuse, je n’étais pas déguisée pour moi, j’étais moi-même. J’ai dû aller aux toilettes et là, patatras, je ne savais pas où aller, chez les hommes ou chez les femmes ??
Peur du rejet des femmes, j’ai subi les moqueries des hommes. Ensuite, ayant vécu ça, j’ai décidé de franchir le pas, j’ai été voir une psychiatre .qui m’a fait comprendre qu’avant tout je devais me soigner avant d’aller plus loin. J’ai arrêté l’alcool et, petit à petit, le reste, soigné dépression angoisses etc. Cela a duré environ 6 ou 7 ans. J’ai connu quelques hommes mais sans apprécier ce qu’ils me donnaient (le sexe). A force, j’ai été écœurée, dégoutée (je ne pense pas qu’ils soient tous comme ça mais ce sont ceux-là que j’ai connu). J’avais la sensation que mon corps, tout comme le leur, me donnait envie de vomir.
J’ai commencé à voir l’équipe du changement de sexe, passer les tests tout en me résolvant au célibat mais aussi la ferme intention d’être femme heureuse. Une année de thérapie par l’équipe, une lesbienne qui me drague. On avait passé beaucoup de temps toutes les deux et ma féminité l’avait séduite au fil des jours. J’ai commencé entretemps à vivre comme une femme, phase-test imposée par l’équipe qui est de pouvoir assumer en public tout ce qu’est une vie de femme habits, psychologie, etc.
Cela n’a pas été une chose facile car les gens sont méchants. Je me suis épanouie dans notre couple car, avec elle, j’avais ma place de femme en ayant en plus de la douceur de la tendresse du soutien, et surtout elle m’assumait comme j’étais. On a eu des difficultés quand même, elle était lesbienne, j’avais un corps de garçon. J’ai pu enfin commencer mes hormones. J’ai très vite ressenti les effets psychologiques avec toutes les joies mais aussi les désagréments car je supportais encore moins mon corps qu’avant, il n’avait pas encore changé. Ainsi que l’incompréhension des gens de me voir me comporter comme une femme dans ce corps.
Puis, j’ai changé, la poitrine s’est développée. Joies d’une adolescente de 33 ans, le temps a passé, ma libido, chose que je n’avais pas avant, s’est réveillée terriblement (je dois préciser que j’ai de l’androcure qui bloque les hormones mâles, les érections, qui rend stérile mais qui soulage terriblement). J’ai revécu pleinement mon adolescence, point de vue poitrine, le cœur qui s’emballe pour n’importe quelle fille, zones érogènes à découvrir, humeur, un vrai comportement d’ado. Entretemps, on a rompu mais nous sommes restées des amies très proches. J’ai été opérée en décembre 2012, une opération de 7h avec un énorme stress la veille, comme vous pouvez l’imaginer. Après l’opération, douleurs, morphine, nombreux soins. Une semaine après, j’ai pu rentrer chez moi toujours avec des douleurs mais soulagée de ne plus avoir ce « truc en trop », j’ai eu beaucoup de soins à la maison, des dilatations pour garder la forme du vagin, une infection avec de gros antibiotiques et une nuit à l’hôpital avec deux baxters de sang. Mais le temps a passé, je suis sortie de la période difficile avec le soutien de mon entourage que je remercie ainsi que celui de ma petite amie. J’ai pu expérimenter l’amour entre femmes ce qui est vraiment merveilleux et épanouissant.
Il faut savoir plusieurs choses: pour un homme qui devient femme (mtf) on dit une trans et l’inverse pour une femme qui devient homme (ftm), c’est important de lui parler au féminin (mtf) et vice versa.
Après plusieurs années de traitement, etc, on ne distingue plus la différence physique avec une autre femme. IL y a des trans qui sont hétéros, lesbiennes /gay ou encore bi. Malheureusement, sur beaucoup de sites internet et dans la vie, on confond les trans avec une sexualité, vous l’aurez compris, cela n’a strictement rien à voir. Les mtf sont souvent terriblement féminines mais beaucoup d’entre vous sont comme saint Thomas, vous ne les croiriez pas tant que vous ne les aurez pas vues. Le parcours des trans est un véritable parcours du combattant tant au niveau de cette société binaire hétéro-patriarcale ainsi qu’auprès des équipes médicales qui sont bien souvent transphobes, auprès de leurs familles, du travail. Ca va mieux une fois que le parcours est bien avancé car on peut mieux se fondre dans la masse.
Léa
Merci Léa pour ce témoignage, pour votre courage et pour toutes celles et tous ceux qui souffrent de trop d’incompréhension.
Création graphique : www.vmscontact.com