« Un jour il m’a dit qu’il n’en pouvait plus, qu’il n’avait plus envie de vivre. Que les regards des gens le fatiguait. Il disait qu’il n’y avait plus moyen de passer dans la rue sans entendre des insultes. » Voilà les mots de désespoir que Félicité Jérémy Françoise a confié à sa sœur Annecy, il y a quelques jours.
Ce mercredi 6 janvier, le jeune homme de 25 ans s’est donné la mort, parce qu’il n’acceptait plus les insultes et les regards des autres en raison de son homosexualité, indique Antenne Réunion. Il l’avait annoncé à sa mère il y a quatre ans.
Tout garder à l’intérieur
Sa mère confie : « Je lui ai dit qu’il n’était pas le seul comme ça. Si Dieu l’a créé comme ça, il reste comme ça. Il n’était pas content qu’on l’insulte. Ça a du lui faire un choc et il a entassé, entassé et ne m’a rien dit.«
Depuis ce jour là, selon sa famille les insultes de trop, les regards de travers ou encore les violences verbales à son encontre sont quotidien. Sa sœur essaie pourtant de le rassurer, quand il disait que dans la rue on le regardait et on le traitait de tous les noms.
Elle raconte : « Je lui disais de ne pas écouter les autres, qu’ils sont là juste pour juger les autres. Que c’était sa vie, qu’il était heureux et d’assumer ce qu’il était.«
Même avec l’appui et le soutien des siens Félicité Jérémy Françoise est passé à l’acte hier. Il essaie d’en finir avec la vie au gouffre de l’Étang-Salé mais est sauvé in extremis par les gendarmes. La seconde tentative lui coûte la vie et laisse un goût amer dans la bouche de ses proches.
Sa sœur à un dernier message aux personnes qui ont « méprisé » son petit frère. « Aujourd’hui j’enterre mon frère, s’il est gay c’est son problème, occupez-vous de vous. Vous aussi vous avez des enfants qui grandissent et vous ne savez pas demain, quel sort Dieu lui a réservé.«
Pour Stéphane Ducamp de l’association Orizon Réunion qui lutte contre les discriminations, le passage à l’acte trouve son origine dans la société qui banalise les insultes envers les homosexuels. « Le mot PD par exemple est régulièrement utilisé par tous. Ce mot qui ne veut rien dire et qui est confondu avec le terme pédophile, sous-entend une certaine faiblesse chez l’autre« , explique-t-il. « On ne choisit pas son orientation sexuelle comme on ne choisit pas sa couleur de peau » martèle Stéphane Ducamp. C’est pour cette raison que Dayen Danon Lutchmee, présidente de l’association Prévention suicide, insiste également sur le rôle que doivent jouer « les proches pour créer un environnement favorable aux discussions sur la sexualité« .
Depuis le début de l’année, trois suicides ont déjà eu lieu dont celui de Félicité Jérémy Françoise il y a deux jours. Des situations qui pourraient être évitées par une meilleure prise en charge.