Quand j’ai fait mon coming-out mon père a explosé « en injures » et ma mère m’a dit : « Mon fils, j’espère juste que tu as pas les mêmes goûts que moi en matière d’homme ! »
Bonjour, Je m’appelle Benjamin. J’ai lu et entendu pas mal de témoignages de personnes qui souhaitaient exprimer leur douleur du rejet de l’homophobie, notamment familiale… et je voudrais y joindre le mien. Une voix parmi d’autres, pour qu’ensemble nous puissions mieux nous faire « entendre ».
Mon premier petit copain avait 16 ans, et moi 15. Je venais de rentrer au lycée, dans mon internat, enfin loin de ma famille – ou devrais-je dire de mon père. Lorsque mon petit ami de l’époque s’est décidé à révéler à sa famille qu’il est homosexuel, je me suis dit que nous devrions sans doute le faire ensemble. C’est pourquoi de mon côté, je me suis lancé, tout en connaissant la future réaction de mon paternel. La maison a explosé dans une déflagration de cris, d’incompréhension, de colère, et d’injustice. « Cuve à SIDA », ou « Cuve à sperme » ont gentiment fait irruption dans la dispute avec mon père. Deux ans de silence et de haine, trop longtemps retenus, ont jailli de moi. Je voulais que mes parents sachent, qu’ils acceptent. Ça n’a jamais été un problème pour ma mère, mais pour mon père… c’est une toute autre histoire.
En effet, à la suite de ce coming-out, il n’a plus voulu en entendre parler, et a commencé à dire que je devais me refouler, faire semblant d’être hétéro « pour la famille ».
J’ai décidé, à cet instant, de ne plus lui adresser la parole. Mon petit ami et moi nous sommes séparés à ce moment… Puis, le lycée est passé, et j’avais rencontré un garçon en terminal avec qui tout se passait vraiment vraiment bien. Alors, lorsque mon père a commencé encore à insulter les gay-pride, je me suis insurgé et il a lancé : « Quoi, t’es pédé ou quoi ? » Je pensais qu’il avait compris… Mais apparemment non.
J’ai entamé un second coming out – pour lui seulement, car ma mère avait depuis longtemps accepté ma sexualité.
À la suite de ça, se sont enchaînées des insultes tout aussi merveilleuses que les premières, presque aussi jolies et poétiques, avec une pincée de colère, un soupçon de haine, et pas mal d’homophobie. « Tu vas crever de maladies bizarres » ou encore « Reste loin des enfants », « Ça va te passer, c’est comme un rhume ». Mais bien sûr, rien n’est passé. Dès lors, mes parents ont divorcé, et mon père a disparu.
Je reçois chaque année une carte postale pour mon anniversaire avec des filles nues dessus, comme pour me rappeler ce à quoi il aspirait pour moi.
Mon témoignage ne changera rien à l’homophobie des parents, ou celle des amis et des proches. Seulement, il a disparu de ma vie, je réussis mes études, j’ai un copain, une vie stable, et je suis heureux. Le seul problème c’est que j’aurais aimé avoir un père. Si je vous écris ce message, c’est pour peut-être voir mon témoignage partagé, dans l’espoir de montrer que malgré cette douleur et cette incompréhension, on reste nous-mêmes, et rien ne peut nous empêcher de vivre heureux. Je le suis aujourd’hui, je suis bien dans mes baskets, dans ma tête, confiant dans l’avenir. Le passé est ce qu’il est.
L’homophobie est cruelle. Ma mère est restée, et elle est heureuse pour moi. La seule chose qu’elle a dite le jour de mon second CO fut:
« Mon fils, j’espère juste que tu as pas les mêmes goûts que moi en matière d’homme ! » On peut souffrir d’un CO, mais on peut aussi en rebondir plus fort.
Benjamin.
Propos recueillis par Nicole V.
STOP HOMOPHOBIE
Joelle à l’écoute des Jeunes LGBT