Si Philippe Malnoy, marié avec Luc depuis un an, se dit « ravi » du ton positif adopté à l’égard des homosexuels lors du synode sur la famille au Vatican, il attend de voir les effets dans les paroisses.
« Très blessé » par les virulentes positions de l’Eglise lors du débat sur le mariage homosexuel, Philippe s’est posé « beaucoup de questions sur (sa) foi et (son) appartenance à la communauté catholique ». « Je suis aujourd’hui plus enclin à me considérer chrétien dans ma foi, que catholique dans l’Eglise », explique-t-il. « J’ai un rapport plus individuel avec Dieu ».
Le document préparatoire du synode des évêques catholiques sur la famille, présenté lundi au Vatican et évoquant pour la première fois les « dons et qualités » que peuvent « offrir » les homosexuels « à la communauté chrétienne », ne le fait pas encore revoir son jugement.
« C’est le bon chemin, mais attendons de voir la pratique », prévient-il. Habitué à fréquenter des abbayes et des monastères où « l’approche des textes est plus profondes et ne sert pas de prétexte à commenter la vie politique », Philippe est sceptique à l’égard de cet effet d’annonce sur les pratiques religieuses dans les paroisses.
Alors qu’il assistait récemment avec son mari à une messe donnée dans l’Eure, des « prises de parti clairement homophobes » les ont conduits à se lever et à quitter les lieux. « On ne se sentait pas accueillis ».
– « Un espace de respiration » –
Luc, son mari, évoque de son côté une avancée « très positive ». « Placer l’amour au même plan pour les normaux hétérosexuels et les vilains anormaux homosexuels est quelque chose de vraiment important », souligne-t-il.
Lui, le baptisé à trois semaines et qui se préparait à devenir prêtre à 20 ans, attend encore davantage de l’Eglise et souhaite qu’elle abandonne sa qualification de l’acte homosexuel comme « acte intrinsèquement désordonné et donc péché. »
L’Eglise, rappelle-t-il, définit le mariage par « la reconnaissance par un baptisé de l’altérité chez un autre », vue comme un homme et une femme. « Il faut étendre cette définition de l’altérité à la situation des homosexuels. »
Pour Jean-Michel Dunand, 49 ans, en couple avec Frédéric depuis 23 ans, ce synode « ouvre « un espace de respiration ». « Enfin les homosexuels sont considérés comme des personnes avant tout, avec des histoires, des singularités. On passe de l’enseignement mortifère du mépris, à une parole d’estime ».
Mais lui qui n’a « jamais été tenté de lâcher la main du Christ malgré des moments de désespérance », dont des séances contraintes d’exorcisme, se prémunit également de tout « enthousiasme béat ».
« Le texte, c’est important, ça donne une impulsion, mais ça ne suffit pas. Il va falloir que ça tombe dans le réel, car il reste encore beaucoup de poches d’exclusion » parmi les croyants.
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