Un soir, tu es venu chez moi. Tu semblais embarrassé et tu tremblais. Tu voulais m’annoncer quelque chose… J’étais inquiète, j’appréhendais que tu me dises que tu avais une grave maladie ou qu’il t’était arrivé quelque chose de terrible. Puis tu as fini par me dire, les yeux pleins d’eau, « je suis gay ». Je t’ai serré dans mes bras mais je n’ai pas pleuré. Je ne m’étais jamais douté que tu étais gay. Je ne m’étais même jamais posé la question. Même si je savais que tu t’étais souvent fait traiter de «fif» ou de «tapette» à l’école primaire et au secondaire, c’était loin d’être une évidence pour moi. De plus, tu ne correspondais pas aux stéréotypes que je me faisais.
Pourtant, ce ne fût pas un choc. Quand tu m’as dit que tu étais gay j’ai ressenti un grand soulagement. J’ai d’abord été soulagée que tu n’aies rien de grave, puis soudain tout est devenu clair car je comprenais enfin pourquoi tu t’étais senti toujours si différent. Mais j’ai été aussi soulagée car j’ai pensé bêtement que ce serait plus facile ainsi pour tes relations amoureuses, qu’il suffirait qu’on te présente un autre garçon gay et voilà! Mais j’ai vite compris que ça ne se passe pas ainsi, trouver la bonne personne n’est pas plus facile.
J’ai également été soulagée que tu sois né à notre époque, dans un pays plus ouvert d’esprit, autrement tu aurais probablement souffert toute ta vie, mais encore là, je me trompais. Ce ne fût pas si facile, car tous n’ont pas accepté aisément ton orientation sexuelle, se demandant à qui la faute et se culpabilisant. Il y eût aussi du déni, des réactions telles que « Ce n’est qu’un trip de jeunesse, une mode, ça va lui passer! » ou encore « Comment peut-il en être certain? Il n’a pas assez d’expérience, il se trompe ». Tu as su rester fort face aux préjugés et tu nous a fait réaliser que les mythes véhiculés sur l’homosexualité étaient faux.
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Puis une fois la tempête calmée et les barrières tombées, je t’ai vu tranquillement t’épanouir. En t’entourant de personnes qui t’aiment et en apprenant à te faire respecter tel que tu es, tu t’es refait une plus solide estime de toi. Je t’ai vu canaliser tes énergies afin de venir en aide à d’autres jeunes victimes d’intimidation et d’homophobie*. Je suis fière de toi comme je l’ai toujours été. Mon attitude, mes sentiments et mon opinion face à toi n’ont pas changé. Je te sens plus heureux, pour moi c’est l’essentiel. Quand tu me présenteras ton futur amoureux, je l’accueillerai de la même façon que j’accueillerais une belle-sœur ou un beau-frère, je l’apprécierai s’il te respecte et te rend heureux et je crois que tu sauras bien lui rendre la pareille.
Ta soeur qui t’aime !
* Nicolas est l’auteur du livre Le cauchemar de l’intimidation, j’ai failli en mourir et de la campagne anti-homophopie Mugshot
Par Stéphanie Vandal, sculptrice.