#Témoignages : Ils sont #catholiques et #homosexuels

Comment assumer à la fois son orientation sexuelle et sa croyance en Dieu? Comment  l’Eglise accueille-t-elle et accompagne-t-elle ceux qui, tout jeunes ou à travers leur itinéraire de vie, se découvrent une attirance, un amour pour une personne du même sexe? Si le sujet reste tabou, des initiatives naissent, des ouvertures se dessinent. La Vie ouvre le dossier et donne la parole à ses lecteurs. Homosexuel (les), parents, amis, intervenants des associations, ils témoignent.

Xavier et Benoît, en couple et en communauté Vie Chrétienne (spiritualité ignacienne)

« En couple depuis 7 ans, nous restons profondément attachés à l’Eglise. Nous sommes actifs au sein de CVX, ou dans notre paroisse. De fait, nous respectons infiniment la position de l’Eglise sur le sujet, nous la comprenons presque, si on considère qu’elle ne peut pas tenir d’autre discours. Nous vivons simplement, nous accueillons ce que la vie nous a ‘réservé’ sans que nous l’ayons choisi, sinon le choix d’assumer, à l’instar de la parabole des talents : à nous de faire fructifier ce que nous sommes, de donner de l’amour là où nous en sommes et de témoigner de cette foi qui nous a été transmise. Cette foi, nous essayons de la transmettre aux 3 enfants de Xavier, quand ils sont à la maison (en vacances) nous essayons de la partager en CVX le plus simplement, le plus profondément possible, sans provocation et sans choquer… cette foi, nous l’avons exprimée lors de la cérémonie de notre Engagement : ce jour-là, en 2010, nous avons fait le choix d’exprimer notre amour mutuel, que nous tournons résolument vers ceux qui partagent notre chemin (enfants, familles, amis, etc) Cette cérémonie, que nous avons créée en discernant avec nos proches, nous ne l’avons pas voulue comme un simulacre de mariage, ça n’aurait pas eu de sens et, fidèles à l’Eglise, nous ne souhaitions pas nous mettre en opposition à Elle. nous avons simplement confié notre projet, notre avenir à Dieu, en les confiant à la prière de nos proches. » Xavier et Benoît.

« Fidèle à ma foi, malgré mon désarroi« 

« Oui je suis homosexuel et catholique. Et pratiquant dans les deux cas… Pourquoi n’aurions nous pas le droit, nous aussi, d’aimer et d’être aimés dans la plénitude de ce sentiment ? Nous ne demandons pas la compassion mais la prise en compte d’une réalité biologique. Un jour en confession, un prêtre me refusa l’absolution par le seul fait de lui avoir avoué que j’étais gay…Quelle humiliation pour moi ! Si vous ajoutez à cela que ma situation n’a jamais vraiment été admise par ma famille, que je mène une vie publique assez intense et que j’habite en province, vous comprendrez aisément qu’il n’est pas toujours facile d’être homo en 2011. Les moeurs évoluent, mais pas les mentalités, du moins pas au même rythme. Malgré des périodes de désarroi et de doute, je suis resté fidèle à ma foi  et je suis aussi engagé dans ma paroisse; je m’accomode cahin-caha de mon état, pensant que l’amour de Dieu est plus fort que la malveillance des hommes. » Olivier.

« Il faut intervenir auprès des parents et des élèves« 

« Le 4 août 1990, notre quatrième fils Jean-Baptiste est mort à 26 ans, dans notre appartement, à cause d’une maladie, diagnostiquée en 1981 au USA, et évoquée alors comme le ‘cancer gay’ : le SIDA. Trois ans auparavant, au lieu du Service militaire, il était professeur à l’Université Saint Joseph de Beyrouth, en pleine guerre civile. Ce n’est pas une balle perdue qui l’a atteint mais le VIH. Il se disait attiré à la fois par les filles et par les garçons… La maladie de Jean-Baptiste m’a fait connaître que les personnes homosexuelles ont des comportements aussi variés que celles qui se disent hétérosexuelles, alors que nos concitoyens ne voient le plus souvent que la face immergée de l’iceberg. Par exemple l’entraide et la fidélité pendant des années peuvent être vécues entre deux hommes de façon  aussi intense sinon plus que bien des couples hétérosexuels. Cela ne devrait plus être ignoré par mon Eglise catholique, tout en réservant le mot ‘mariage’ aux couples formés par un homme et une femme. Je signale un remarquable document de l’Enseignement catholique (mai 2010) sur ‘L’éducation affective relationnelle et sexuelle dans les établissements catholiques d’enseignement’. ‘ Un nombre non négligeable d’hommes et de femmes présentent des tendances homosexuelles foncières. Ils ne choisissent pas leur condition homosexuelle. L’éducation aborde donc, ici, une question extrêmement sensible. Des formes diverses d’homophobie peuvent gravement blesser les personnes… L’éducateur doit donc veiller tout particulièrement à articuler ce qu’il peut dire de la différence sexuelle au respect inconditionnel des personnes.’. Pour ce faire il serait souhaitable qu’il y ait plus de personnes qui se forment pour intervenir auprès des parents et des élèves : Sesame, agréée par l’Education nationale. » Un père de famille.

« Les évêques doivent prendre en compte la question« 

« J’ai entendu l’appel de Dieu à 12 ans, à un âge où j’ai également découvert quelle était ma sexualité. Je ne l’ai jamais mal vécu car j’ai été élevé dans un milieu très oecuménique; j’ai vu que la réflexion anthropologique menée par d’autres Eglises permettait de voir le problème tout autrement. Autour de moi en revanche, j’ai très vite vu les dégâts que le silence faisait chez de nombreux prêtres, séminaristes, qui se torturent sur cette question. Les évêques doivent absolument prendre la question en compte pour les membres concernés de leur clergé, et leur proposer un lieu de partage. Ensuite il faut familiariser les communautés avec cette question, et permettre à ceux qui le désirent de se retrouver pour mieux vivre leur présence en paroisse. Membre d’un grand ordre religieux pendant plusieurs années, j’ai décidé de le quitter lorsque je suis tombé amoureux, en expliquant la raison de mon départ. Un vrai renoncement, car j’étais un religieux heureux. Ce coming out instiutionnel a suscité une véritable tourmente dans mon ordre. Il y a une peur terrible de la vérité. On m’a suggéré plutôt de rester, mais en me taisant. On s’inquiétait surtout de savoir ce qu’allaient penser les gens. Or les fidèles, eux, m’ont soutenu et compris. En revanche, je n’ai jamais remis en cause ma vocation sacerdotale; la donnée de mon orientation sexuelle  ne m’empêche pas de vivre et servir. Aujourd’hui, j’ai retrouvé un ministère puisque j’ai été accueilli en paroisse. L’évêque connaît mon histoire. J’ai un ami que j’ai choisi, et vis à vis duquel je suis engagé, mais j’ai renoncé à une vie sexuellement active dans le couple. C’est un chemin qui épanouit et complète ma vie. Je n’ai jamais été aussi équilibré. » François, 42 ans, prêtre en paroisse.

« Vers une démarche d’acceptation de mon incarnation »

« Depuis que j’ai douze ans je pense que je suis mauvais. A vingt ans j’ai envoyé balader la religion. Dieu ne pouvait pas vouloir de moi puisque j’étais homo. Quelques années plus tard j’ai été saisi par son message d’amour, Il m’aimait comme j’étais. Alors je me suis préparé à une vocation religieuse, qui était très forte, sans plus me poser la question de mon homosexualité. J’étais probablement dans une forme de refoulement. Et puis j’ai eu une relation avec un séminariste, et j’ai pris conscience qu’en fait, le problème me dépassait largement. Je suis arrivé avec toutes ces questions à une retraite de choix de vie. Là, Dieu m’a mis face à mes contradictions de façon bouleversante. C’est dans l’expérience spirituelle que j’ai compris que je devrais prendre en compte pleinement qui j’étais… je n’avais pas avancé d’un pouce pendant toutes ces années ! Aujourd’hui, j’ai donc mis de côté mon projet religieux ― qui, en un sens me permettait de régler mon problème à bon compte ― pour entreprendre ce que je considère être une démarche raisonnable d’acceptation de mon incarnation. L’Eglise doit sortir l’homosexualité de la marginalisation; si elle continue à la caricaturer comme une vie de perdition, elle nous pousse au silence et à une vie pulsionnelle cachée dont nous ne voulons pas ! » Louis, 28 ans.

« Une bombe dans notre famille« 

« Quand votre enfant vous annonce qu’il est homosexuel, c’est une bombe qui tombe dans votre famille! Vous pensiez que vous étiez ouverts à beaucoup de situations, vous découvrez que précisément celle là ne peut être abordée en vérité avec les autres membres de votre famille tant elle est taboue. Les autres enfants ne comprennent pas votre blocage, et vous êtes si malheureux que vous ne trouvez ni le courage, ni les mots pour en parler avec votre conjoint (il nous a fallu 6 mois pour en discuter vraiment et constater qu’on ne pouvait rien faire face à notre fille de 23 ans). Quand j’en parle avec elle, elle dit qu’elle n’a jamais été si heureuse de sa vie, même si elle est  tombée amoureuse comme ça sans avoir aucune tendance avant. Si je lui dis qu’elle n’est peut-être pas homosexuelle et qu’elle aurait pu chercher à vivre d’autres situations, elle répond que c’est comme ça et que je devrais discuter avec mes amis, ma famille. Je suis incapable de parler avec qui que ce soit car je ne retire aucune fierté de notre situation familiale, à l’heure où tous nos amis sont dans les mariages et les naissances! MB.

« J’ai enfin associé mon esprit et mon corps »

« Je suis chrétienne, homosexuelle et heureuse : ma vocation d’amour est différente, mais pas inférieure. Et pourtant, j’ai intériorisé très jeune que ‘les homosexuels ne font pas partie du plan de Dieu’. Pour faire partie du plan de Dieu, j’ai mis en place un clivage mental : j’aimais Dieu, les autres, j’étais une catholique passionnée de l’Évangile, j’étais une infirmière passionnée des gens malades et à soulager mais je n’étais pas une femme. Je me suis mariée avec un chrétien très gentil. Mais dans l’alliance parfaite homme-femme-Dieu, j’ai vécu une sorte de désolation. Ce fut un mariage de mort, une relation contre ma nature, qui m’a rendue gravement malade. Autant mourir pour aimer en éternité, puisque j’étais incapable d’aimer, me disais-je. En fait, mon amour n’était pas à la bonne place. J’ai rencontré une femme ; c’était cela ma vérité. Ainsi la découverte et l’acceptation de mon homosexualité ont été spectaculaires. J’ai enfin associé ma foi, ma sexualité, mon esprit et mon corps. C’est la division qui rend malade. Face à Dieu, mon premier amour, j’ai pu rassembler les pièces éparpillées, devenir enfin celle que je suis, déculpabilisée, apaisée et bénie. Chaque baptisé est appelé à aimer et à donner. » Sophie.

Le centre Tibériade, une famille pour les malades du sida

« Ayant accompagné toute ma vie, dans le cadre de mes activités professionnelles, des personnes homosexuelles le plus souvent marquées par l’infection HIV, je me suis tout naturellement retrouvé comme administrateur et accompagnateur d’un accueil de jour pour ces mêmes personnes quand l’heure de la retraite a sonné. Le centre Tibériade, hébergé par le Diocèse en plein coeur du 7ème arrondissement de Paris, a été crée par Mgr Jean Marie Lustiger à la demande de Mère Téresa. Une équipe de bénevoles et de permanents accueille 5 jours par semaine des personnes chahutées par la vie, souvent isolées et malades. Près de 7000 repas, préparés par une discrète équipe de bénevoles, sont servis chaque année. Les personnes accueillies ont souvent rompu tout lien avec leurs familles. Elles retrouvent à Tibériade un climat chaleureux et attentif où elles peuvent très naturellement partager leur quotidien, exposer leurs angoisses et trouver une écoute et une aide tant sur le plan psychologique que thérapeutique. Une bibliothèque, des jeux, des activités artistiques, des visites, des séjours « au vert » sont proposés, sans oublier une initiation à la foi chrétienne et la présence régulière d’un aumônier avec une possible participation à la messe du vendredi après-midi. Une réelle fraternité se vit à Tibériade au point que de nombreux accueillis affirment chaque jour « ma famille est ici ». Michel

Être catholique et transgenre

« Si l’Eglise commence timidement à prendre en compte l’homosexualité, elle semble complètement ignorer voire rejeter les personnes transgenres ou transexuelles. C’est ainsi que n’ayant  trouvé jusqu’à il y a 4 ans aucun lieu d’Eglise pour m’accueillir avec ma spécificité, j’ai cheminé pendant plus de 15 ans avec un groupe d’homosexuels chrétiens : ‘devenir  un en Christ » (D.U.E.C), qui m’a aidé, mais ne répondait pas pleinement à la prise en compte de ma ‘différence’. J’ai découvert la Communion Béthanie. Seul lieu d’Eglise à ma connaissance, se souciant avec le C.C.I. (carrefour des chrétiens inclusifs) des personnes transidentitaires qui pour l’instant m’accompagne sur le plan spirituel et m’aide à concilier Foi et Transidentité. Isabelle

Parents d’homosexuels

« Il est indispensable et urgent de libérer la parole de parents d’homosexuels qui sont souvent en grande souffrance et de jeunes qui ne savent pas vers qui se tourner lorsqu’ils comprennent qu’ils sont homosexuels.
En effet l’Eglise (au fait c’est qui, l’Eglise ?) traite le sujet de façon expéditive, comme elle l’a fait pour la contraception,  même si elle prend soin de ne pas condamner  les personnes.
Le Magistère dénonce trop souvent cet état (car ce n’est pas un choix, c’est un état de fait) comme un désordre (au mieux), une perversion (au pire) et n’a à proposer que ‘vivre dans la chasteté’
Le groupe ‘Réflexion et Partage’ auquel nous participons réunit des parents concernés par ce problème et des jeunes, souvent en couple, et a élaboré une plaquette d’information sur le sujet ‘Orientation sexuelle et vie chrétienne’. Il souhaite que des groupes se constituent et proposent aux autorités ecclésiales une parole apaisée et constructive. » Claude et Jacques.

Par Elisabeth Marshall et Joséphine Bataille

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