Dans une interview accordée ce lundi 26 juin au magazine féminin Brigitte, la chancelière allemande a déclaré qu’elle abandonnait « son opposition de principe » au mariage des personnes de même sexe, pour un vote en conscience des députés. Elle entendait ainsi, en prévision des élections du 24 septembre, priver ses rivaux de gauche d’un thème porteur durant la campagne et se débarrasser d’un sujet de plus en plus encombrant.
L’Allemagne fait partie des rares pays occidentaux à ne pas avoir légalisé le mariage égalitaire, même si Berlin a adopté en 2001 une union civile offrant les mêmes droits, sauf en matière d’adoption.
66 % des Allemands y sont pourtant favorables, selon une enquête YouGov, et 73%, selon un autre récent sondage de la chaîne ZDF. Et les potentiels partenaires de la chancelière font tous de cette légalisation une condition de leur participation à une coalition après les législatives.
Mais elle tablait sur une décision au Parlement dans plusieurs mois, le temps déjà pour son mouvement, l’Union chrétienne-démocrate, très divisé sur la question, de mener un débat interne.
Pour lui reprendre la main, le parti social-démocrate (SPD), dont le chef de file Martin Schulz est également son principal rival, a donc dès le lendemain saisi l’occasion, lui imposant un vote sans tarder, qui, en l’état des rapports de force au Bundestag ne peut être que positif pour le mariage entre personnes de mêmes sexe : les conservateurs y sont minoritaires face aux trois partis de gauche (SPD, écologistes et gauche radicale), tous favorables au mariage pour tous.
Les élus ont d’ailleurs approuvé mercredi en commission le renvoi en séance plénière d’une proposition qui autorise le mariage des homosexuels. L’inscription formelle à l’ordre du jour ne sera prise que ce vendredi matin en séance plénière.
Mais en précipitant le calendrier, les sociaux-démocrates actent de facto le divorce de la coalition qu’ils forment avec les chrétiens-démocrates depuis 2013. Le chef du groupe parlementaire conservateur, Volker Kauder, a dénoncé « une rupture de confiance », l’adoption du projet ne figurait pas dans le contrat de coalition conclu après les précédentes élections.
« Nous ne parlons pas ici d’un changement mineur d’une loi mais d’une modification de notre constitution qui affecte les convictions profondes des gens ainsi que la conception du mariage, pilier de notre société », a regretté Mme Merkel dans une nouvelle interview au magazine Wirtschaftswoche. « Je ne comprends pas qu’une telle décision soit transformée en conflit partisan, je trouve cela triste et totalement inutile », a-t-elle ajouté.
Schulz estime pour sa part qu’en refusant de parler des sujets qui préoccupent la population et en se reposant uniquement sur son bilan, Angela Merkel « attente à la démocratie ».
Le climat entre les deux mouvements s’était déjà passablement envenimé ces derniers jours à mesure que la campagne électorale entre dans le vif du sujet et que le SPD passe à l’offensive pour tenter de réduire son retard dans les sondages sur les conservateurs.