« Théorie du genre »: des bibliothèques victimes de pressions

Le Printemps français, groupe d’opposants radicaux au mariage homosexuel, appelle les parents à contacter les bibliothèques pour qu’elles retirent des rayonnages les livres reflétant à ses yeux la « théorie du genre », a déclaré mardi à l’AFP sa présidente, des « pressions » condamnées par le gouvernement.

« Les livres qui mettent dans la tête d’une petite fille ou d’un petit garçon qu’ils ne sont pas forcément fille ou garçon en fonction de leur sexe biologique mais qu’ils décideront quand ils seront plus grands, ces livres-là doivent être mis à part », estime Béatrice Bourges. Elle considère que ces ouvrages « sèment la confusion » dans la tête des petits.

« On demande aux parents d?appeler les bibliothèques, d?appeler les mairies pour que ces livres soient retirés des rayonnages », explique-t-elle, se félicitant que des appels téléphoniques aient déjà été émis « un peu partout » en France par des « parents citoyens soucieux de l’éducation de leurs enfants ».

La ministre de la Culture Aurélie Filippetti a dénoncé lundi les pressions exercées contre des bibliothèques par « des mouvements extrémistes ».

« Près d’une trentaine de bibliothèques publiques ont fait l’objet, ces derniers jours, de pressions croissantes de la part de groupuscules fédérés sur internet par des mouvements extrémistes qui en appellent désormais à la lutte contre ce qu’ils appellent les +bibliothèques idéologiques+ », a affirmé la ministre dans un communiqué.

Selon Mme Filippetti, ces groupes « se rendent dans les bibliothèques de lecture publique, exercent des pressions sur les personnels, les somment de se justifier sur leur politique d’acquisition, fouillent dans les rayonnages avec une obsession particulière pour les sections jeunesse, et exigent le retrait de la consultation de tout ouvrage ne correspondant pas à la morale qu’ils prétendent incarner ».

« Ça existe peut-être mais je ne suis pas au courant », a réagi mardi Béatrice Bourges, évoquant simplement des appels téléphoniques.

Ces actions ont notamment visé les villes de Versailles, Rennes, Nantes, Dole, Toulon, Lamballe, Saint-Etienne, Troyes, Le Chesnay, Massy, St-Germain-en-Laye, Andernos-les-Bains, Neuilly-sur-Seine, Mérignac, Tours, Strasbourg, Castelnaudary, Quimperlé, Boulogne-Billancourt, Riom, Clermont-Ferrand, Lyon, Viroflay et Cherbourg, selon une source proche du ministère.

Le président de l’UMP Jean-François Copé a critiqué dimanche un livre, « Tous à poil », qu’il avait présenté comme recommandé par le Centre national de documentation pédagogique aux enseignants pour les classes primaires. Selon le ministère de l’Education, il s’agissait en fait d’un livre recommandé par une association encourageant la lecture chez les jeunes dans la Drôme et l’Ardèche, reprise par l’académie de Grenoble.

Peillon accuse Copé d’être le porte-parole de groupes extrémistes

Le ministre de l’Education nationale Vincent Peillon accuse Jean-François Copé de se faire «le porte-parole de groupes extrémistes» après la polémique autour du livre pour enfants «Tous à poil» lancée dimanche par le président de l’UMP.

Interrogé dans Libération à paraître mercredi sur les critiques de M. Copé et de Bruno Le Maire, M. Peillon a noté qu’il y avait «deux registres» d’attaques. «L’un, totalement irresponsable, est celui de M. Copé qui se fait le porte-parole de groupes extrémistes. C’est très préoccupant, et je ne crois pas que tous les hommes et les femmes de droite s’y retrouvent», dit-il. «L’autre registre, tout aussi démagogique mais plus subtil, est celui de M. Le Maire: l’école n’apprendrait plus à lire, écrire, compter», juge le ministre.
Lors d’une interview dimanche sur le plateau du Grand Jury (RTL-LCI-Le Figaro), le député-maire de Meaux avait brandi un livre pour enfants qu’il a présenté comme «recommandé aux enseignants» pour les classes primaires et intitulé Tous à poil», se demandant s’il fallait «en sourire». Pour M. Le Maire, les enseignants «sont là pour apprendre à nos enfants à lire, à écrire, à compter, à maîtriser les savoirs fondamentaux», «pas pour faire l’éducation des nos enfants à la place des parents». Selon M. Peillon, «on assiste à une offensive de milieux extrémistes telle qu’on n’en avait pas connue depuis longtemps, contre les valeurs de l’école – la raison, l’égalité, la laïcité».
«Ce qui est paradoxal aujourd’hui, c’est que des dirigeants républicains et prétendument laïcs se joignent à ces attaques. Je pense à Monsieur Copé qui l’a fait à deux reprises, poursuit-il, estimant que «sans doute ces dirigeants font-ils des calculs politiciens à courte vue».
«Leur outil de propagande est le mensonge. Ils mentent sur les ABCD en voulant faire croire qu’on allait apprendre à des petits garçons à s’habiller en petites filles alors qu’il s’agit d’éduquer au respect. Ils mentent quand ils prétendent que l’éducation nationale impose la lecture d’ouvrages recommandés par des associations de parents»,  dénonce t-il.