68 pays criminalisent encore aujourd’hui l’homosexualité, portant ainsi atteinte au droit au respect de la vie privée. Dans l’intimité, entre adultes consentants, les personnes sont libres d’adopter le comportement sexuel de leur choix. Rien ne justifie que les États réalisent une immixtion dans la vie privée en pénalisant l’homosexualité.
C’est une atteinte au principe de liberté de la personne. Ce droit implique une protection contre les arrestations et détentions arbitraires. Il interdit également aux États de poursuivre une personne qui ne présente aucun danger pour la société. Le délit d’homosexualité est un délit sans victime. Sans dommage causé à la société, les États ne peuvent pas prononcer de condamnation pénale.
Cette criminalisation des rapports sexuels entre adultes consentants est également une atteinte au principe d’égalité devant la loi. Pourquoi un État priverait-il une partie de sa population des droits les plus élémentaires ? Soumettre les homosexuels à des lois particulières qui les discriminent relève de la même logique que la soumission des noirs à des lois qui organisent une ségrégation raciale. L’apartheid est un régime politique insupportable, la pénalisation de l’homosexualité l’est tout autant !
Elle s’accompagne par ailleurs d’une absence de protection étatique et d’une impossibilité d’accéder à la justice. Lorsque les personnes LGBT subissent des lynchages ou des viols dits « correctifs » à cause de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre, il leur est impossible de porter plainte. Lorsqu’ils se rendent aux postes de police, ils sont eux-mêmes arrêtés et leurs agresseurs ne sont pas inquiétés.
La plupart de ces États pénalisant l’homosexualité ont pourtant adhéré à des traités internationaux et ont intégré à leur constitution des chartes qui établissent des standards de protection des droits humains. En Afrique notamment, trente-deux États pénalisant l’homosexualité ont ratifié la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, qui a ainsi une valeur supérieure à celle des lois pénalisant l’homosexualité.
Les persécutions ainsi subies par les personnes LGBT+ dans ces pays sont malheureusement universelles.
Les archives de la police française fourmillent de renseignements sur les arrestations arbitraires et violences vécues par les homosexuels au 18e siècle ! Qu’il s’agisse autrefois de la France ou aujourd’hui de la Malaisie, du Qatar, de l’Iran ou de l’Afghanistan, la pénalisation de l’homosexualité offre une base légale à la police lui permettant de perpétrer toutes les dérives.
Le rapport « Our Identities Under Arrest » de l’International Lesbian and Gay Association (ILGA) analyse plus de 900 cas d’arrestations de personnes LGBT dans des pays pénalisants l’homosexualité. Le constat est alarmant. La quasi-totalité des arrestations sont accompagnées de violations manifestes des droits fondamentaux : violences physiques et psychologiques, tortures, viols, absence d’accès aux soins, et notamment aux antirétroviraux pour les personnes atteintes du VIH.
En droit pénal international, le crime contre l’humanité est défini comme une attaque systématique ou généralisée lors de laquelle les personnes subissent des actes d’emprisonnement, de torture, de viol, de persécution ou de traitements inhumains. De tels faits à l’encontre des personnes LGBT sont régulièrement dénoncés par les rapports d’ONG de défense des droits humains et par l’ONU. Il est temps que cela cesse.
La pénalisation de l’homosexualité est une offense à l’humanité. Nous exigeons une dépénalisation universelle, partout et maintenant !
Signataires :
Robert BADINTER, avocat, ancien Garde des Sceaux
Clément BEAUNE, ministre des Transports
Daniel BORRILLO, juriste-chercheur au CERSA
Jean-Marc BERTHON, ambassadeur français aux droits LGBT
Étienne DESHOULIÈRES, avocat, secrétaire général de l’Association pour la dépénalisation universelle de l’homosexualité
Pierre KARLESKIND, député européen (Renaissance)
Terrence KHATCHADOURIAN, secrétaire général de STOP Homophobie
Jean-Jacques DISSOKE MANIBEN, expert plaidoyer chez Alternatives Cameroun
Moïse MANOËL-FLORISSE, journaliste pour 76crimes
Assala MDAWKHY, coordinatrice de projets pour Avocats Sans Frontières
Joseph MESSINGA NKONGA, secrétaire permanent Fiertés Afrique Francophone
Alice NKOM, avocate camerounaise engagée dans la défense des droits LGBT
Jean-Luc ROMERO-MICHEL, adjoint à la Maire de Paris en charge des droits humains, de l’intégration et de la lutte contre les discriminations (Parti socialiste)
David VALENCE, député des Vosges (Renaissance)