L’association Shams a annoncé avoir reçu le 4 janvier une notification par huissier de la part du chargé du contentieux de l’État d’une ordonnance sur requête décidant la suspension de ses activités pour 30 jours.
Le vice-président de l’ONG, Ahmed Ben Amor, dénonce une décision « politique » : « L’association exerce ses activités tout en respectant la loi. (…) Cette décision montre une volonté politique d’entraver nos activités », a-t-il avancé à l’AFP.
Une demi-victoire pour les militants humanistes contre l’obscurantisme qui souhaitait faire taire l’association définitivement, souligne néanmoins Farhat Othman, juriste, politiste et ancien diplomate : Cette décision est même « la preuve que Shams est une réalité dont on ne peut plus faire abstraction dans la nouvelle Tunisie se voulant démocratique, et que son combat est des plus légitimes. »
Créée l’an dernier, Shams est la première association à défendre publiquement les droits des minorités sexuelles en Tunisie. Elle a tenu sa première réunion publique à l’automne et réclame l’abrogation de l’article 230 du code pénal, qui punit de trois ans de prison la sodomie et le lesbianisme, fustigeant également le recours à « toucher rectal » dans le cadre des procédures, un acte « inhumain et dégradant ».
Dans un pays qui rejette massivement l’homosexualité, 94 % des Tunisiens, selon une étude américaine, la naissance de Shams n’aura pas fait l’unanimité. Une solide dose de conservatisme et une part de tartufferie ont suffi à menacer les fondateurs de cette organisation. Rappelons en effet que Hedi Sahly, vice président de l’association, a d’ailleurs trouvé refuge en France à la suite de menaces de mort. C’est donc avec beaucoup courage que ces jeunes militants et militantes veulent changer les mentalités par la pédagogie.
Le mois dernier, l’ONG a vivement dénoncé la condamnation de six étudiants de Kairouan (centre) à trois ans d’emprisonnement et à une interdiction de séjour de cinq ans dans cette ville pour « pratiques homosexuelles ». « Nous n’allons pas rester sans réagir », avait déclaré M. Ben Amor.
Le président tunisien Béji Caïd Essebsi a rejeté début octobre l’hypothèse d’une dépénalisation de l’homosexualité : « Ceci n’a pas eu lieu et n’aura pas lieu, je refuse », avait-il asséné lors d’un entretien sur une chaîne TV égyptienne, allant jusqu’à désavouer son ministre de la Justice, Mohamed Salah Ben Aïssa, qui s’était prononcé en faveur de l’abrogation de l’article 230.
[spacer]
[spacer]
En réaction, les sympathisants de l’association Shams s’interrogent sur le laxisme de l’Etat tunisien qui n’a toujours pas suspendu les activités du parti salafiste Hizb Ettahrir, qui affiche son rejet de la démocratie représentative et de l’Etat civil et appelle à l’instauration du califat et au remplacement de la constitution par la charia. Ce qui pourrait en effet constituer un danger pour la société et pour la stabilité de la Tunisie…
stophomophobie.org