Kemal Ördek, militant LGBT qui avait récemment été victime d’une agression homophobe il y a de cela plus d’une semaine, vient de publier via le site d’information bianet, une lettre ouverte dans laquelle il dénonce l’apathie et l’inaction du gouvernement face aux affaires de viols et de kidnapping impliquant notamment des personnes transsexuelles.
La lettre s’adresse plus directement à Ayşenur İslam, ministre de la Famille et des Politiques sociales, à qui Kemal Ördek reproche l’absence d’initiatives concernant les personnes transgenres ainsi que le manque de réactivité des forces de l’ordre face aux victimes de viols en Turquie : « Cher ministre, je suis une personne transgenre et j’ai été violé, on m’a extorqué, menacé et insulté. J’ai été confronté au mauvais traitement de la police que j’avais consulté afin de me protéger de la violence qui m’avait été infligée. Un de vos officier m’a même dit : « mais vous n’avez pas été violé », un autre était mécontent que le peuple de Loth [les premiers homosexuels selon le Coran] n’était pas éteint. »
Le jeune homme a ensuite poursuivi sa lettre en pointant du doigt l’indifférence totale à laquelle il avait été soumis concernant son propre viol : « Cher ministre, vous êtes ministre pour tous, n’est ce pas ? Les personnes transsexuelles et les travailleurs du sexe en font-ils partie ? Si la réponse est oui, alors je vous le demande, pourquoi gardez vous le silence sur ce que j’ai vécu ? (…) Serez-vous à mes côtés lors de mon procès ? (…) ou serais-je seul, serons-nous seuls, à mériter ce que nous endurons ? »
Kemal Ördek accuse aussi le Gouvernement de ne pas reconnaître les personnes transsexuelles comme des personnes à part entière : « Cher ministre, le silence est-il de mise ? Nous ne sommes peut-être pas des femmes à vos yeux, nous ne sommes peut-être pas des personnes « morales » non plus, mais nous sommes humains nous aussi. »
Ördek a aussi rappelé à l’occasion les meurtres d’Özgecan Aslan et de Münevver Karabulut, deux étudiantes turques qui avaient été violemment assassinées et dont les meurtres avaient été massivement médiatisés après l’indifférence notable des forces de police. Özgecan Aslan avait été assassinée après avoir essayé de se défendre contre une tentative de viol. L’affaire avait fait scandale en Turquie et avait donné suite à de nombreuses manifestations dans tous le pays. Le corps de Münevver Karabulut avait quant à lui été retrouvé décapité dans une poubelle. La négligence avec laquelle l’affaire avait été traitée par la police avait choqué le pays tout entier, lorsque son agresseur, Cem Gariboğlu, n’avait pas été retrouvé. Gariboğlu s’était rendu six mois plus tard, avant de se suicider en 2014.
Sophie de Tapia
aujourdhuilaturquie.com